Par Jehan Alfarra,
« À cette époque, le pain était comme de l’or. » Ce sont les mots d’un survivant du siège de Leningrad, sans doute l’un des chapitres les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale et un rappel obsédant de l’horrible tribut payé par des populations délibérément privées de ressources essentielles.
À Gaza, Israël a délibérément bloqué l’acheminement d’eau, de nourriture et d’autres produits de première nécessité aux 2,2 millions d’habitants de l’enclave assiégée.
Alors que Gaza est assiégée par Israël depuis 2007, le 9 octobre 2023, le ministre israélien de la défense, Yoav Gallant, a décrété un blocus total de Gaza, les forces israéliennes ayant lancé une guerre à grande échelle contre le territoire palestinien.
Dans un récent rapport, Human Rights Watch a qualifié de crime de guerre l’utilisation par le gouvernement israélien de la famine collective de civils comme méthode de guerre dans la bande de Gaza assiégée.
« Le droit international humanitaire, ou droit de la guerre, interdit d’affamer des civils comme méthode de guerre », indique le rapport, citant le statut de Rome de la Cour pénale internationale, établi après les horreurs de la Seconde Guerre mondiale.
Au milieu de cette tourmente, la cuisine locale de Gaza est devenue un témoignage de résilience et de persévérance face à l’adversité, beaucoup utilisant les ingrédients disponibles localement pour persévérer malgré des ressources limitées.
La farine est l’ultime trésor, car le pain reste au cœur de la survie à Gaza. Les produits palestiniens de base tels que l’huile d’olive, le za’atar et la duqqa, qui se conservent longtemps, ont également été une bouée de sauvetage pour beaucoup de ceux qui ont pu les stocker ou s’en procurer.
Cependant, comme les forces israéliennes continuent de raser les zones agricoles, de détruire les boulangeries, les entrepôts alimentaires, les minoteries ainsi que les routes utilisées pour le transport de l’aide humanitaire, la dépendance à l’égard des produits locaux ne sert que de tampon partiel pour quelques « chanceux » face à la pénurie aiguë imposée par le siège, la campagne de bombardement à grande échelle et l’invasion terrestre.
Même pour préparer les repas, il faut trouver des alternatives au gaz de cuisine, comme le bois de chauffage ou les bouts de carton.
Plus de 80 % de la population de la bande de Gaza assiégée a été déplacée à l’intérieur du territoire et sa capacité à se déplacer et à chercher de la nourriture a été sévèrement limitée.
Selon un rapport du Integrated Food Security Phase Classification (IPC), la proportion de ménages de Gaza touchés par des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë est la plus importante jamais enregistrée par l’initiative IPC à l’échelle mondiale.
Selon le rapport parrainé par les Nations unies, plus d’un demi-million de personnes, soit un quart de la population de Gaza, sont déjà en situation de famine.
« La situation est telle que presque tout le monde à Gaza a faim », a déclaré Arif Husain, économiste en chef du Programme alimentaire mondial (PAM). Début décembre, le PAM a indiqué que neuf personnes sur dix à Gaza ne pouvaient pas manger tous les jours et sautaient des repas pendant de longues périodes.
La restriction délibérée des fournitures essentielles, notamment la nourriture, l’eau et l’aide médicale, accentue la détresse d’une population déjà confrontée aux dures réalités d’une offensive de grande envergure.
En deux mois seulement, près de 20 000 Palestiniens ont déjà été tués, dont 70 % de femmes et d’enfants.
La communauté internationale a l’obligation morale de condamner des tactiques aussi flagrantes et de donner la priorité aux efforts diplomatiques visant non seulement à imposer un cessez-le-feu, mais aussi à mettre fin au siège de Gaza une fois que les activités militaires auront cessé, à garantir un accès sans entrave à l’aide humanitaire et à rechercher une solution durable qui respecte la dignité et les droits des civils pris au piège dans le territoire palestinien occupé.
Source : Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine
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