Géopolitique

Bilan d’un an de conflit : « Entre la guerre et le déshonneur, nous avons choisi la guerre, nous aurons le déshonneur. »

Je tenais par cette citation à rappeler à tous ceux qui aiment à nous dresser les parallèles historiques que comparaison n’est pas raison. Il est toujours facile de se proclamer être du bon côté de la barrière, lorsque 90 ans après on invoque des références. Le narratif occidental veut que Poutine égale Hitler et que mu par une soif inlassable de puissance il désire recréer le monde d’avant 1989, voire, cette fois-ci, terminer à la Corogne pour bouter une fois pour tous les Américains hors d’Europe. C’est là une manière élégante, reconnaissons-le, d’admettre le contrôle US sur l’Europe si bien mis en valeur par l’attentat de Nord Stream et ses suites.

mise à jour le 15/06/23

Soyons un instant l’avocat du diable, l’explication russe du conflit se fonde en partie sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et l’accord de Munich ressortait de la même logique. Il est donc facile pour les petits télégraphistes du système de jouer sur une homothétie superficielle.


J’invite les lecteurs désireux d’approfondir le procédé à revoir la scène du Président où Gabin et Blier se livrent une querelle de mémoire sur la position des morts de la guerre. Comme dit le président Beaufort : « Je voulais montrer que moi aussi, je peux faire voter les morts ». Et d’un ton sec il ajoute : « Le procédé est assez méprisable, croyez-moi. » Avec cette sentence en tête, faut-il s’étonner de voir le système politico-médiatique y recourir ? Non, depuis la guerre en Libye, nous connaissons la place de la morale et de l’estime de soi chez ces individus : aucune !

Ces gens, grassement rémunérés par le système pour leur cours de morale (6 milliards de subventions publiques rien dans la seule France macronniste, plus d’autres avantages que je suis trop paresseux pour sommer) vivent de la transformation des saletés gouvernementales en nobles causes. Ils sont les avocats de la veuve contre l’orphelin, ceux du notable contre la veuve et bien sûr de l’état contre le notable. Voués à la défense du fournisseur de subventions dont dépend leur précaire survie, mercenaires de la plume ou de l’image, ils se nourrissent de la perversion de notre morale. Venant du commun, on me pardonnera mon côté ignoble, je fais, vous me le pardonnerez, un très mauvais chevalier monté sur son cheval blanc puisque je ne monte pas. Et donc la noblesse de la bourgeoisie française aux ordres des pouvoirs Washingtoniens ou berlinois me laisse de marbre.

Donc redescendons dans la boue des faits, je m’y sens plus à l’aise que dans les cours de morale à géométrie variable.
En 2021, malgré de nombreux avertissements russes des forces ukrainiennes se massent dans le Donbass. Nous savons depuis les articles de Seymour Hersh que la planification pour la destruction des gazoducs Nord Stream commence à la même période. La corrélation traduit-elle la préméditation ? On peut le penser, en tout cas, le moment semble idéal. L’armée ukrainienne, 3,8 % du PIB, 450 000 hommes plus 50 000 paramilitaires a achevé sa remontée en puissance. Cette force pitoyable en 2014, mal motivée, mal commandée passe désormais pour l’une des plus grandes armées d’Europe et constitue donc une menace à la fois pour le Donbass et pour la Crimée. En face la Russie venait de diminuer son budget militaire après avoir mis à niveau ses forces aérospatiales (après avoir dépassé les 80 milliards de dollars par an entre 2012 et 2014, il était redescendu à 62- 66 milliards dans les années suivantes).

Face aux premiers événements, les Russes organisent des exercices, montrent leurs forces, envoient des ambassadeurs. Mais, ils ne préparent pas d’hôpitaux de campagne, ou de préparatifs d’invasion. L’objectif semble donc être d’établir un rapport de force pour soutenir le travail de leurs diplomates. D’importants efforts sont donc tentés de leur part qui rencontrent systématiquement porte close ou mauvaises excuses. Notre président, Emmanuel Macron se distingue dans le domaine. Rappelons la règle de Montesquieu : « Les vrais responsables de la guerre ne sont pas ceux qui les déclenchent mais ceux qui les rendent inévitables. » À ce compte, les chroniques de l’année 2021 constituent un réquisitoire contre les choix (Délibérés ? l’histoire y répondra) des dirigeants occidentaux, car à cette date, le conflit peut être évité.

Maintenant que nous savons que les USA planifiaient la destruction de Nord Stream, le choix est fait, l’Occident veut briser la Russie. Ou plus exactement les cercles washingtonniens du département d’état on choisit la guerre pour nous. Personne ne s’étonnera alors de voir les diplomates russes certes traités avec une cordialité de façade, mais leurs propositions reçoivent un accueil glacial et les bombardements redoublent dans le Donbass. Cette phase trouve son paroxysme avec la phrase de Mr Macron : « Ce ne sont pas des séparatistes qui vont faire des propositions sur les lois ukrainiennes ! » Par cette simple phrase, le dirigeant français exclut les habitants du Donbass du processus politique ukrainien. Comme le dit Cyrano, s’il avait eu quelques lettres, notre président se serait rappelé des compromis des guerres de religion (Tel l’édit de Nantes), bien souvent les révoltés ont justement proposé des lois. Dans toute guerre civile, l’accord se conclut sur la base des propositions des deux parties, les juristes assurent ensuite l’intendance. Singulière vision du monde où les dirigeants promeuvent la paix sans les concernés ! Mais j’ignore où monsieur Macron a appris la sensibilité.

En ce temps-là, d’ailleurs les ultras se précipitaient pour saborder le moindre accord et prolonger la saignée. Aujourd’hui des Occidentaux appellent, au mépris des positions sur le terrain à la guerre sauf si la Russie abandonne Donbass et Crimée. Les Guises, chefs de la ligue catholique ont trouvé là leurs dignes héritiers. Comme le disait monsieur de Montebourg devant l’assemblée, nous avons affaire à des Ayatollahs du droit. Ils ont raison, le droit est en leur faveur surtout lorsqu’ils se jugent entre eux et ignorent leurs propres violations. L’Occident juge décide ainsi de reconnaitre le Maïdan comme l’expression d’un peuple ukrainien unifié décidé à prendre en main son destin. Magnifique histoire, jugée à huis clos par le jury des acteurs. Sauf que, comme le procès du capitaine Dreyfus la sentence pourrait être entachée par de menus détails oubliés.

Disparue la violente querelle politique sur les accords. L’Ukraine négociait des accords commerciaux avec la Russie et l’Union européenne. Ceux-ci prêts, l’UE exige un accord exclusif, condition nouvelle et véritable origine de la crise. Sans cette demande de monsieur Baroso, l’Ukraine eut survécu. La sagesse conventionnelle aurait été un accord intérimaire le temps de trouver une solution technique. Mais, non, immédiatement éclate la révolution du Maïdan et quelques milliers d’individus dans la rue témoignent de « la volonté unanime » du peuple ukrainien qu’avant des sondages donnaient 48% pour l’accord avec la Russie et à 35% pour l’UE.

Furieusement pro gilet jaune, j’aurais mauvaise grâce à condamner les manifestations de rue. Il y a d’ailleurs eu des mouvements et des groupes spontanés dignes de respect. Le lecteur me permettra de tout de même trouver surprenant de voir nos élites nous seriner : « La rue ne gouverne pas en France » et trouver tant de charme démocratique aux émeutes du Maïdan. Sur notre terre, la république est agressée lorsque la porte d’un ministère est défoncée mais si des Ukrainiens envoient cinq cents policiers à l’hôpital (dont une centaine avec des blessures par balles) c’est le peuple démocratique qui se lève. Devrais-je en déduire que les protestations sociales en France ne blessent pas suffisamment de policiers pour être démocratiques ? Le contraste est savoureux et mon âme noire ne peut s’empêcher de s’évoquer, la morale de La Fontaine : « Selon que vous serez puissants ou misérables, les jugements de cours vous rendront blancs ou noirs« . Blanc le Maïdan si pur, noir les opposants à Monsieur Macron, la logique est au moins claire en fonction des intérêts américains.

La presse, se charge du tri et tient lieu de cours en France, une vieille tradition maintenue avec soin. Reconnaissons le maintien soigneux des principes essentiels de cet artisanat d’art Français. À chaque fois, il manque en réalité un véritable processus politique. Une manifestation est une alerte sérieuse de la perte de légitimité du pouvoir et de son incapacité à se maintenir comme avant. Alors, prenons l’exemple de mai 68. La rue marque une défiance, et si le général de Gaulle s’assure de disposer des moyens de la répression il ne la lance pas, mais traite le problème au plan politique : il dissout l’assemblée et donne au peuple le pouvoir de choisir son destin. Lors du coup d’État du 18 brumaire, quelques mois plus tard un plébiscite suit et valide l’action. On peut critiquer, mais à chaque fois, le peuple a eu l’occasion de se prononcer.

Au contraire, la constante face aux gilets jaunes, comme face au Maïdan est la non-convocation d’élections. Le pouvoir macronien reste en place et s’enfonce dans un autisme sanctionné par l’archivage des contributions au grand débat. En Ukraine, la nouvelle Rada envoie la troupe contre les oppositions et, provocation, abolit la loi sur les langues. Faut-il s’étonner qu’après l’incendie de la maison des syndicats à Odessa les opposants préfèrent les armes à l’attente des bataillons de représailles ? Blanc ou noir ? La pureté ukrainienne d’un peuple courageux décidé à prendre son destin en main ne résiste pas à ces faits. Loin d’être le fruit d’une large majorité de la population le Maïdan est l’œuvre d’une minorité agissante (aidée par de l’argent étranger ?), une action sans la sanction du peuple et cette clique l’évitera. La nouvelle élection attendra les sécessions et séparatismes, ces sorties massives de population rendues inévitables par le comportement de la clique de Kiev modifient le corps électoral ukrainien pour livrer le résultat attendu.

Des minorités agissantes sans légitimité à l’assaut du pouvoir en place, au moins désigné selon un processus légal ? Ne parlions-nous pas d’un moustachu des années 30 ? Oh, oserais-je voir dans le Maïdan une réplique des agissements nazis dans l’Autriche d’avant l’Anschluss ou dans les sudètes ? Mais, alors, Poutine serait-il innocent du Maïdan et des séparatismes ? Pardonnez mon crime par la pensée. Je serais certainement un vilain monsieur, mais je m’identifie si facilement à un hérétique et prend tant de plaisir à analyser moi-même les faits et à tirer mes propres conclusions, à la manière dont les protestants voulaient évaluer eux-même les saintes écritures. Vous savez à l’instar de ce Voltaire si désireux de défendre un Protestant (forcément coupable) contre le consensus ou ce Zola, qui s’est laissé condamner pour sauver un Juif (là aussi forcément coupable). Alors, bien sûr, vers de terre en admiration devant des étoiles, je ne saurais me hisser à leur hauteur, mais permettez-moi de défendre mon russe contre la meute hurlante et de lutter pour un traitement équilibré. Nous devrons vivre avec les conséquences de cette époque et de nos choix, le choix de la lutte par certains d’entre nous pourra sauver l’honneur.

La révolte de la Crimée et du Donbass est-elle donc illégitime ? À la vue des éléments précédant il me semble que non, mais elle n’arrange pas nos seigneurs. Surtout, elle repose sur l’idée, ô combien absurde que les dirigeants auraient des comptes à rendre à l’homme de la rue. Honni soit qui mal y pense, le peuple est là pour se taire et admirer les chefs validés par la brigue. Il est donc plus simple de l’expliquer par une intervention russe si utile pour détourner l’attention des erreurs de nos dirigeants. Permettez-moi de douter. Le Maïdan éclate en février 2014, la révolte du Donbass en avril 2014, elle est bien sur nous dit-on l’œuvre du FSB auquel rien ne semble impossible.

Examinons tout de même un instant les deux thèses. D’un côté, un président pro-russe se fait chasser et deux mois plus tard, des régions entières s’embrasent sous l’action des services secrets russes. Avec un dirigeant favorable au Kremlin, il n’y avait aucune raison de préparer de telles actions assez peu amicales si jamais elles étaient découvertes. Donc le FSB est meilleur que James Bond, et avec les embrasements sociaux à répétition que connaît la France, ils auraient dû nous faire tomber s’ils sont si bons. Vous remarquerez pourtant la présence au pouvoir persistante de monsieur Macron.

Second scénario, les USA depuis le milieu des années 1990 financent des organisations en Ukraine. Un premier essai a lieu en 2008, mais le vote élimine les fauteurs de troubles. Bis répétita en 2014, mais cette fois-ci, l’on s’assure que le vote sera conforme aux attentes. Qu’importe que ce soit au prix d’une guerre civile, on enverra les bataillons néonazis (2 % du corps électoral) expliquer la vérité aux récalcitrants. Laquelle de ces deux thèses semble la plus réaliste sur le plan logistique ? Le miracle du FSB ou un lent travail de sape et d’influence dans un pays perclus de problèmes ? Rien n’est impossible aux Russes donc nous validerons bien évidemment la première hypothèse, mais alors, il faut s’assurer de bien condamner les séparatistes. Macron y pourvoira.

Au delà d’une analyse géopolitique, la terrible phrase d’Emmanuel Macron pour condamner une région entière aux flammes de la guerre, relève de ce racisme social, si primaire chez lui. Savait-il seulement dans quoi il mettait les pieds tellement il est englué dans la moraline et la communication ? Glissons, n’appuyons pas. Avec Monsieur Macron, il est impossible d’être certain. S’il jette l’équivalent d’un cocktail Molotov sur les barils de poudre ukrainiens patiemment remplis (nous y reviendrons) depuis 2014, impossible de savoir si c’est par stupidité ou par cynisme. Le procès de monsieur Macron devant la Cours Pénale Internationale (les Français peuvent être traduits devant, alors que Russes et ukrainiens ne le peuvent pas, autant pour les rêves de jugements de certains) établira son état psychiatrique et son éventuelle responsabilité de ses actes. Monsieur Bonne, son conseiller diplomatique risque fort de lui tenir compagnie.

Par suite de cet échange, le maintien des séparatistes dans l’Ukraine devient impossible, merci Monsieur le président de nous avoir fait franchir le Rubicon et avoir déchiré les accords de Minsk. Et vous fûtes capable de laisser publier ce témoignage accablant… On regrette Audiard en cet instant, la politique de ce temps avait plus de tenue. Poutine se montre pourtant modéré et se refuse à déclencher les hostilités. Il établit désormais la Russie comme garant de la sécurité des républiques. Il reprend donc à son compte l’entière responsabilité des accords de Minsk, et donne une ultime chance à la paix. Au gouvernement ukrainien de la saisir. Hélas, durant ces quelques heures, les bombardements ukrainiens sur le Donbass redoublent, et les instances internationales parlent encore des accords de Minsk juste après leur assassinat par E. Macron.

Reste désormais une seule option, l’armée russe active ses plans et entre dans la lutte aux côtés des républiques. Les Russes invoqueront le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (huit ans de conflit démontrent le refus des habitants de ces régions à se laisser diriger par le régime issu du Maïdan) et, chose plus étonnante, l’article 51 sur les mesures d’urgence. Il faut regarder la carte du Donbass pour comprendre. L’armée ukrainienne, forte de lignes de défense puissantes construites pendant les huit ans de la parodie minskienne, peut lancer rapidement un assaut dévastateur depuis ses bases et un an plus tard, ce front n’a toujours pas cédé.

L’analyse que l’on peut prêter aux russes est qu’appuyer ainsi, l’armée ukrainienne est capable dans le secteur de son choix lancer une offensive et avancer de quelques dizaines de kilomètres. Donetsk, à même le front, est particulièrement exposé. Une chute de la ville, alors livrée aux bataillons de représailles ukrainiens serait un désastre humanitaire. Cette interprétation explique une certaine désorganisation au début du conflit et la raison pour laquelle nombre d’observateurs (dont moi, je l’admets) ne croyaient pas à une attaque imminente. Les déploiements précédents étaient vus comme un moyen de négociation. Si les troupes avaient des ordres de marches prêts et c’est le professionnalisme minimum, personne ne s’attendait à les voir activés. La situation diplomatique semble avoir forcé la main des Russes pour les contraindre à activer les plans de réserve. Et la priorité est de lever la menace sur Donetsk et peut-être aussi sur la Crimée
Les Russes doivent donc opérer sur un large front pour disperser les réserves ukrainiennes.

D’où les multiples axes d’attaque. Dans le sud pour rouvrir le canal Dniepr Crimée, fermé par le gouvernement ukrainien pour assoiffer la Crimée. C’est un crime en droit international, mais nous avons choisi de l’ignorer pendant des années. Faut-il s’en étonner ? La presse française a bien accepté récemment de se faire l’apôtre d’un nettoyage ethnique en Crimée. Nous prouvons rétrospectivement la justification des craintes russes. Ensuite, unifier les lignes au sud, exclure les Ukrainiens de la mer d’Azov, la manœuvre se terminera par la destruction d’une large partie du bataillon Azov à Marioupol dont il est difficile de savoir si l’incompétence l’emporte sur la criminalité (ils exposaient des civils). Les unités de fusiliers marins de l’armée ukrainienne se battront avec courage pendant que les hommes d’Azov, se contenteront, eux, de peser sur leurs ressources.

L’assaut sur Kiev reste l’ultime axe offensif et peut-être le plus intéressant. L’affaire mobilise les réserves ukrainiennes et donc contribue certainement à empêcher une attaque dans le Donbass. Nous savons le Premier ministre israélien occupé à ce moment à négocier un accord entre Ukraine et Russie destiné à mettre fin au conflit. Tout est prêt, au moment où selon le médiateur (Premier ministre d’Israël rappelons-nous) les pays occidentaux l’empêchent d’aller plus loin. La mécanique de cette guerre vient de monter d’un cran et l’OTAN entre, à ce moment dans le conflit. Nous voila donc coresponsables de tous les morts de ce conflit puisque nous avons refusé la volonté ukrainienne de faire la paix. Puissent les Erinyes nous pardonner.

Ce conflit aurait pu se résoudre par un référendum d’autodétermination dans le Donbass et le Lougansk devient un conflit entre l’armée russe et les arsenaux (vides, situation savoureuse/dramatique d’incompétence.) de l’OTAN. Pourquoi l’OTAN ? La rand corporation fournit la réponse. Durant l’ère Eltsine les pays de l’OTAN ont commencé à organiser le pillage de la Russie. Poutine, a limité les dégâts et entamé une reprise de contrôle des principales sociétés (armement, matières premières) par l’état russe. Au contraire, les Ukrainiens ont entre 2014 et 2022, aliéné les actifs aux intérêts privés occidentaux. Les dirigeants de l’ouest désirent donc placer la Russie sous le même genre de tutelle. Une Russie, trop puissante au goût des pouvoirs occidentaux, il faut donc la dépecer pour la maîtriser. La stratégie est donc de fragiliser Poutine avec le coût et les souffrances liés au conflit et aux sanctions. Partout, espèrent nos dirigeants criminels, des successeurs se lèveront et deviendront, à terme, des seigneurs de guerre et des territoires autonomes émasculés. Ceci dans un territoire parcourut par des milliers d’armes nucléaires. On a surement créé des plans plus stupides, mais il y a du travail et c’est malheureusement à la hauteur des œuvres occidentales des dernières décennies (Irak, Libye, Syrie…).

Depuis 2008 les élites occidentales sont, il importe de s’en souvenir, sous pression. Nous constatons que le pillage par les Américains s’accélère et que les réformes du système financier mondial ont échoué. La déliquescence de l’économie réelle devient de plus en plus difficile à masquer. La guerre Ukraine Russie devait servir de prétexte pour sanctionner cette dernière et les souffrances ainsi provoquées devaient conduire au régime change. Un pays divisé et soumis aux seigneurs de petites mares pour que le pillage des ressources permette d’alimenter encore une économie occidentale moribonde. En ce sens, la guerre d’Ukraine est un conflit de survie dont nous devons apprécier les enjeux.

Alors, quel bilan tirer de tout cela ? L’offensive russe a atteint plusieurs objectifs importants : La Crimée reçoit de nouveau de l’eau (enfin plus maintenant avec la destruction du barrage, gageons que les russes auront à cœur de le remettre en état). L’armée ukrainienne est pour l’heure sur la défensive et les armes livrées par l’OTAN s’évaporent dans la fournaise. Seule limite, Donetsk est toujours menacée par l’artillerie ukrainienne et celle-ci semble prendre plaisir à tuer des civils avec ses ultimes obus. Alors, bien sûr, il existe des défaites, tactiques, peut-être même opérationnelles, mais une guerre a son propre rythme. Les Russes regrettent certainement des occasions manquées. Mais quelle est cette évaluation du conflit selon laquelle échouer à atteindre la perfection prouve votre incompétence ? En pratique, l’armée russe demeure un colosse. Comme tel, il se déplace à la façon d’un rouleau compresseur. Ce n’est ni subtil, ni rapide, mais solide et une guerre se gagne à la dernière bataille.

Et au bout d’un an de combats, la situation, jours après jours entre une armée dotée de capacités de production solide et une Ukraine limitée à racler les fins des stocks de l’OTAN, tourne en faveur de la première. Un conflit de plusieurs années, deux ou trois, est envisageable si les chiffres de pertes se confirment : 20 000 tués côté russes contre 150 000 tués pour les ukrainiens (iI est étonnant de constater que l’opposition russe dans les pays baltes et la presse turque donnent des chiffres proches. En face les services secrets occidentaux publient un set de données très différent). Mais alors, quelle sera notre position ? Une saignée de 400-500 000 soldats ukrainiens représente la mort démographique de ce pays. On glose sur la natalité russe, mais comment fera l’Ukraine déjà confrontée à la même situation avant-guerre ? Alors, il est certain que de bonnes âmes seront prêtes à fournir aux Ukrainiennes la matière première pour produire les bébés, mais nos professeurs de morale accepteront-ils de s’installer dans ce pays ? Nombre de femmes émigreront plutôt. Le pays sera alors totalement détruit sur le plan démographique. Bilan de  l’affaire, l’Occident aura alors assassiné un pays dans une querelle douteuse qui aurait pu être arrêtée avec un peu de diplomatie et d’écoute des revendications russes.

Chacune des manipulations de nos gouvernants sera comptée contre nous et maintenant nos armes s’évaporent, la menace militaire aussi. Petit à petit, nous effrayons moins et les portes des chancelleries se ferment devant nos ambassadeurs. Notre querelle avec le Maroc (ou d’autres pays, Mali ? Burkina Faso? L’OPEP qui désormais décide de ses quotas de production sans tenir compte de nos demandes… la liste s’allonge), n’est qu’un avant-goût du prix terrible que nous paierons ces prochaines années. Or, ne l’oublions pas, l’Europe est dépendante de ses importations de matières premières. D’où les tirerons-nous si le monde refuse d’échanger avec nous ? Déjà, avec notre économie productive (industrie+bâtiment+ agriculture) en déliquescence, nous avions le défi de faire accepter notre papier monnaie, désormais nous rajoutons un obstacle au moment où nous sommes plus que jamais dépendants. Comment ferons-nous accepter la baisse du niveau de vie si jamais le scénario se réalise ? Car tel est le risque.

Le monde nous rejette de plus en plus et si la menace de nos armes hypnotise encore certaines nations, elles sont chaque jour de moins en moins nombreuses. Alors, comment les convaincrons-nous ? Notre magnifique narratif explique certes que Poutine, horrible dictateur, mu par une pensée impérialiste a agressé une nation innocente désireuse de se séparer de la Russie mais il prend l’eau de tout côté. Le soi-disant dictateur bénéficie encore, semble-t-il, d’un large soutien dans sa population et son opposition est souvent plus jusqu’au-boutiste que lui. Quel dirigeant occidental peut se targuer d’une telle position (pas Scholtz contraint de se défendre sous les huées, pas Macron haï par de larges segments de sa population, pas Bidden honnis par les trumpistes) ? Les choses en sont au point que la première ministre estonienne appelle les Russes à cesser de plaisanter des sanctions, existe-t-il pire aveu d’échec ?

Sur le front, le mythe de la nation unie pour échapper aux griffes russes s’ébrèche lorsqu’un Ukrainien normal est interrogé. Trop d’entre eux, laissent encore échapper des méchancetés envers le « gentil » gouvernement du Maïdan et son œuvre économique. Selon de vilains bruits des civils refusent de se laisser évacuer pour attendre les Russes. Calomnies certainement. Mais, l’observateur attentif réalise que les peuples ukrainiens restent divisés et, chose étonnante (pour ceux qui croient à la pureté kiévienne), les mobilisations touchent de manière privilégiée les régions non ukrainophones (vu les pertes cela ne durera probablement pas).

Deux mythes qui lentement sombrent, si l’on y ajoute l’interventionnisme occidental qui a justement conduit à l’explosion d’une société civile ukrainienne déjà fragile, notre plateau de la balance pèsera si lourd. Car pour la première fois, le jugement essentiel ne sera pas porté par l’occident, mais par le reste de la planète informée selon ses propres sources et non celles de nos médias. Eux décideront ainsi du prix, probablement terrible à payer pour nous réinsérer dans le concert des nations. Que ferons-nous alors lorsque la sentence tombera : coupable ?

Jules Seyes pour Le Média en 4-4-2

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