Youssef Hindi et Pierre-Antoine Plaquevent sont-ils en désaccord avec Pierre Hillard ?

Dans une interview vidéo de "Culture Populaire", Youssef Hindi et Pierre-Antoine Plaquevent ont abordé leur conférence commune intitulée "1914-2023 : la longueur guerre contre l'Eurasie" qui s'est déroulée à Nice. Les deux intervenants ont également partagé leur expérience lors d'un débat avec Pierre Hillard, spécialiste des questions géopolitiques, qui avait précédé cette conférence.

mise à jour le 04/07/23

Youssef Hindi souligne que malgré leurs divergences, lui et Pierre Hillard ont travaillé sur des sujets communs, tels que le messianisme juif et son impact, bien que leurs approches diffèrent. Pierre Hillard s’intéresse davantage à la régionalisation de l’Europe en vue d’un gouvernement mondial, tandis que Youssef Hindi se concentre sur la question du sionisme. Les deux experts sont d’accord sur la désignation de l’ennemi, ainsi que sur la méthodologie de destruction des religions traditionnelles, en particulier du catholicisme. Cependant, ils divergent sur la question de l’islam, Pierre Hillard considérant cette religion comme compatible avec le Nouvel Ordre Mondial, tandis que Youssef Hindi s’y oppose, arguant que l’islam est continuellement attaqué et détruit par les mêmes forces qui s’en prennent au catholicisme.

Pour l’essayiste Youssef Hindi, il est primordial de privilégier les points de convergence, bien que les divergences soient significatives. Il mentionne notamment le débat sur l’éventuelle affiliation sataniste d’Alexandre Douguine, l’intellectuel et auteur russe souvent relayé sur le projet Strategika. Cependant, il estime que cette polémique est secondaire par rapport aux enjeux politiques actuels, tels que la promotion de l’anomie et du LGBTisme par l’État français.

De son côté, Pierre-Antoine Plaquevent exprime son admiration pour Pierre Hillard et souligne l’importance de la résistance à la dissolution de l’humanité. Il explique que les pôles de résistance, qu’ils soient chrétiens orthodoxes, musulmans, bouddhistes ou aborigènes, doivent mobiliser leurs forces pour contrer les forces de liquidation de l’humanité. L’auteur et analyste politique mentionne également la nécessité pour la France et l’Europe occidentale de s’émanciper de l’emprise destructrice des États-Unis avant d’envisager une discussion avec la Russie. Il met en avant l’idée d’une romanité plus extensive, englobant à la fois l’Église catholique romaine et l’Église orthodoxe, considérant que ceux qui s’opposent au désordre organisé et au millénarisme peuvent être considérés comme « romains » dans ce sens.

Transcription 

Youssef Hindi :

Alors, nous avons effectivement eu un débat à Colmar au moment où nous enregistrons cet entretien. La vidéo n’est pas encore sortie. Le débat a duré entre une et deux heures. J’ai voulu profiter de cette rencontre, cette conférence commune, pour aborder les points de divergence, tels que sa vision du gouvernement mondial, etc. Les auditeurs et les spectateurs pourront regarder cela. Cependant, il y a plusieurs points de convergence entre nous, car nous avons travaillé sur des sujets communs. Nous avons travaillé sur le messianisme juif et sur son impact. Lui, à l’origine, s’est davantage intéressé à la régionalisation et au morcellement de l’Europe en vue d’intégrer un gouvernement mondial. Quant à moi, j’ai commencé à travailler principalement sur la question du sionisme.

Nos travaux convergent sur un certain nombre de sujets, mais nous avons également des divergences que vous découvrirez ailleurs. Nous sommes d’accord sur la désignation de l’ennemi, notamment avec Pierre-Antoine. Nous sommes également d’accord sur la méthodologie de destruction des religions traditionnelles. Pour lui, il s’agit principalement du catholicisme. Cependant, nous ne sommes pas d’accord sur l’islam. Il le considère comme une religion qui s’intègre parfaitement au Nouvel Ordre Mondial, alors que je ne suis pas d’accord. Selon moi, si c’était le cas, il n’y aurait pas eu besoin de détruire le califat, les pays musulmans n’auraient pas été détruits, et l’islam n’aurait pas été constamment attaqué. En réalité, ceux qui ont attaqué et cherché à détruire l’islam sont les mêmes personnes qui s’en sont pris au monde catholique, à l’église et à la monarchie française, par exemple.

Personnellement, je recherche plutôt les points de convergence, mais il est vrai que les points de divergence sont assez importants. Cependant, de mon point de vue, ils sont secondaires. Par exemple, la question de savoir si le fait qu’Alexandre Douguine ait cité un poème de Crowley en 1996 fait de lui un sataniste, et si notre lien actuel avec lui sur Strategika fait de nous des complices. Je ne souhaite pas m’attarder sur ce terrain, car cela me semble même pas secondaire, mais plutôt complètement éloigné. C’est de la politique, voire une polémique inutile. Si l’on cherche le satanisme et le pouvoir satanique, nous sommes déjà plongés dedans. L’État français, avec Emmanuel Macron, caresse le torse d’un délinquant à Saint-Martin, promouvant ainsi d’une certaine manière l’anomie, qui fait la promotion de l’homosexualité et du LGBTisme. Donc, que le satanisme existe ou non, il est bien présent et domine.

Concernant la Russie, je pense que Pierre en parlera mieux que moi. Tout comme la majorité des peuples du monde, la Russie a été infestée par le modernisme et le progressisme. Actuellement, lors de ce qu’ils appellent « l’opération spéciale » ou la guerre contre l’OTAN en Ukraine, nous voyons que ce processus de confrontation avec l’Occident joue un rôle d’exorcisme, éliminant progressivement les éléments progressistes et sataniques, s’il y en a. Donc, nous avons beaucoup de points communs, mais les divergences s’amplifient, car nous sommes tout de même d’accord pour dire que le modernisme et le progressisme ont également infesté la Russie, tout comme ils ont infesté le monde musulman. Lorsque nous comparons l’Occident avec le monde musulman, l’Afrique et la Russie, nous remarquons une sorte de résistance anthropologique. Elle est présente en Russie, en Asie centrale, au Proche-Orient, au Maghreb et en Afrique. Je ne dirais pas qu’elle a complètement disparu en Occident, mais elle tend à s’effacer dans une société occidentale qui accepte sans trop de résistance la propagande LGBT.

Il est vrai qu’il existe des réseaux, le LGBTisme et le progressisme, tout cela fait partie de l’humanité. Cependant, il faut revenir à la réalité anthropologique. À un moment donné, les chefs d’État ne peuvent pas aller à l’encontre des valeurs de leur peuple, sinon leur peuple les rejettera. Je pense que c’est ce qui explique pourquoi quelqu’un de très modéré comme Vladimir Poutine se radicalise. Comme je l’ai déjà dit à Pierre Hillard lors du débat, il ne s’est pas radicalisé par choix personnel. Il s’est radicalisé parce que l’Occident l’attaque violemment et veut lui imposer le LGBTisme, par exemple. Manifestement, la population russe rejette ces valeurs inversées, et Poutine est donc obligé de s’aligner sur les valeurs de son peuple, sous peine d’être rejeté.

Pierre-Antoine Plaquevent :

Bon, déjà, pour préciser un point, moi Pierre Hillard, c’est vraiment quelqu’un que j’admire pour ses travaux et j’ai un immense respect pour lui, même au niveau personnel. C’est une personne vraiment exceptionnelle. Ensuite, en ce qui concerne le principe politique qui nous anime, je reviens sur cette notion de « néguentropie ». Ce qui m’intéresse, c’est ce qui résiste, que ce soit un chrétien orthodoxe, un musulman sunnite, un chiite, un bouddhiste, ou même un aborigène d’Australie. Tout ce qui résiste à cette force de dissolution de l’humanité, à cette liquidation de l’humanité. Donc, j’ai l’impression que chez Pierre, sa lecture est plus strictement catholique, traditionaliste. Et cela influence sa vision, donc hors du catholicisme traditionaliste, nous sommes toujours dans le schisme. Mais du point de vue politique, je peux très bien concevoir cette vision. Il faut voir ce qui est le moindre mal. Par exemple, on peut dire que dans les écrits de jeunesse d’Alexandre Douguine, il est assez clairement contre l’Église catholique, mais il se réfère surtout à l’Église catholique polonaise. Il fait même référence à la franc-maçonnerie en disant qu’il faudrait favoriser une maçonnerie anticatholique en Pologne. Cela relève d’une stratégie visant à miner les positions géopolitiques de l’adversaire, de l’atlantisme. De plus, il y a aussi un aspect de provocation chez Douguine, surtout dans sa jeunesse avec le mouvement national-bolchevique. Il y a un aspect facétieux, artistique dans sa mise en scène. Mais cela ne me choque pas, car souvent les avant-gardes culturelles deviennent des avant-gardes politiques dans les mouvements, en particulier au XXe siècle. Si l’on regarde les débuts du communisme, du fascisme, de tous les mouvements politiques anti-libéraux, on remarque que cela est intéressant. Ces débuts ont toujours un rapport avec l’esthétique, voire avec la culture provocatrice. Donc, je pense que Douguine, dans sa jeunesse, était plutôt ainsi, mais progressivement, en raison de son rôle politique, il a adopté un cadre plus traditionnel. Cela ne me choque pas outre mesure.

Ensuite, pour revenir au principe de la néguentropie et de ce qui affaiblit mon adversaire ou mon ennemi principal, cela peut être bénéfique pour moi. C’est le premier principe. Ensuite, l’idée que nous serions pris dans un choc de deux millénarismes qui seraient égaux, ce n’est pas le cas. D’un côté, nous avons une puissance qui est toute-puissante, et de l’autre côté, nous avons des pôles de résistance qui vont forcément générer leur propre mystique politique. Si l’on examine les travaux d’Alexandre Douguine, on peut voir qu’il est dans quelque chose de similaire. En fait, tous les pôles de puissance ont cette forme de croisement, à la fois théologique et politique, qui leur permet de mobiliser les esprits à l’échelle de la société. C’est la même chose en Iran, en Israël, etc. On dirait que cela serait interdit en France, où l’on devrait rester strictement rationnels. Mais à la fin, cela ne fonctionne pas, car nous sommes animés par une puissance de vie, même spirituelle, tandis que les autres ont cette puissance. C’est pourquoi nous avons ce problème en France, même dans la résistance au sens large. Nous observons les événements se dérouler, et cela me pose problème. Je peux rejoindre Pierre sur cette idée selon laquelle nous serions un peu spectateurs, pris entre l’atlantisme et l’eurasisme. Nous sommes écartelés, mais j’ai envie de dire que c’est de notre faute. Nous devons générer notre propre volonté de puissance, même spirituelle. Les choses se feront naturellement, et nous serons pris comme des acteurs sérieux, sans être écartelés. Si nous devenons un pôle de puissance alternatif, comme Chirac et Schroder ont essayé de le faire à l’époque, avec Poutine dans un axe Paris-Berlin-Moscou, nous aurons de nouveau une colonne vertébrale géopolitique qui nous permettra de résister. Sinon, nous serons balayés. En ce qui concerne la manière dont nous serons balayés, cela ne m’intéresse pas autant que d’avoir un levier sur la réalité pour agir, y compris un levier spirituel

Youssef Hindi :

Sur le plan géopolitique, si l’on considère les États-Unis et la Russie sur le même plan, ils ne sont pas du tout sur le même plan, car leur histoire et leur anthropologie diffèrent. Il y a une puissance thalassocratique universelle d’un côté, et de l’autre, une puissance territoriale théocratique, un territoire immense avec seulement 145 millions d’habitants, plus les 6 millions d’Ukrainiens. Nous ne sommes pas du tout confrontés au même danger, entre guillemets. Jusqu’à présent, les Russes n’avaient ni la capacité ni la volonté d’imposer un modèle civilisationnel, autre que le communisme, qui n’a plus rien à exporter en réalité. Et même si la Russie représente un danger potentiel, pour résister à ce danger, il faudrait que l’Europe occidentale, en commençant par la France, s’émancipe de l’emprise destructrice des États-Unis. Donc, si nous priorisons l’ennemi, l’ennemi prioritaire est les États-Unis, qui abritent les messianistes judéo-protestants qui détruisent l’Europe continentale. Il faut d’abord s’émanciper et retrouver une souveraineté politique. À partir de là, nous pourrons ensuite discuter avec la Russie, d’autant plus que la France dispose d’un arsenal nucléaire. La Russie n’a pas la capacité d’envahir autre chose que l’Ukraine, avec ses 145 millions d’habitants. Elle n’a pas d’idéologie à exporter, l’eurasisme, c’est quelque chose d’abordable pour les intellectuels, mais essayez de le vendre en français, ça reste quand même un autre monde. Donc, la priorité, c’est de sortir de l’emprise des États-Unis avant de chercher un éventuel projet impérial universel de la Russie, qui n’existe pas en réalité.

Pierre-Antoine Plaquevent :

En conclusion, peut-être pourrais-je revenir sur l’idée de romanité. Personnellement, ma vision est plus extensive que celle de Pierre. La romanité ne doit pas être seulement identifiée à l’Église catholique romaine, mais pour les orthodoxes aussi, ils se considèrent romains. Pour eux, l’Empire romain a duré jusqu’à la chute de Constantinople, et la Russie est l’héritière de cet empire, d’où l’idée du troisième Rome. Donc, si l’on adopte une vision extensive de la romanité, ceux qui s’opposent au désordre organisé et au millénarisme sont romains dans ce sens-là. La Russie n’est pas catholique romaine, mais elle est orthodoxe romaine, et elle fait partie du katechon. Certains pourraient dire que c’est nous qui sommes dans les catacombes, mais moi, je vois cela plutôt comme le katechon, ce sont les restes de la romanité dans la postmodernité que nous devons unir pour résister à la marée montante et destructrice du chaos globaliste.

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