L’échec des sanctions : la Russie sort plus forte, l’Occident plus faible !

mise à jour le 11/08/23

La confusion organisée autour du succès ou de l’échec des sanctions vise à empêcher les citoyens de prendre position. Cette prudence peut sans doute se révéler judicieuse, cependant les Ukrainiens, quant à eux, paient un tribut bien plus redoutable afin de poursuivre le rêve de leurs dirigeants et des nôtres.


Cet article fera exception aux formes habituelles. Même la « Pravda de Kiev », un journal qui n’est généralement pas perçu comme favorable à la Russie, présente une série d’articles concernant les sanctions :

Tous ces articles ont un point commun :

« Le matériel a été créé dans le cadre du projet ANTS « Les actifs russes comme source de récupération de l’économie ukrainienne », mis en œuvre en coopération avec l’Institut national démocratique (NDI) avec le soutien financier du National Endowment for Democracy (NED). »

Nous sommes donc en présence de la frange la plus anti-russe et la plus décidée à combattre la Russie. Ils ont donc des biais, mais la comparaison entre leurs sources d’informations et le récit présent dans l’esprit des Occidentaux sur les sanctions relève du grand écart.

Commençons par le commencement le point sur les sanctions de 2014, l’estimation démarre sur le matériel d’exportation pétrolier :

«  À l’époque (en 2014), ils n’avaient la capacité de fournir que 20 % des équipements nécessaires aux opérations de forage; Ce chiffre est passé à 50 % en 2019. »

Le même phénomène s’est observé sur le porc et dans d’autres industries, les sanctions ont agi comme un protectionnisme et ont poussé l’industrie russe à se renforcer. Mais bon, admettons, c’était 2014, depuis nos dirigeants ont eu le temps de « réfléchir » (Et nous savons grâce à Monsieur Lemaire comment ils réfléchissent) et d’établir un nouveau plan de sanctions « infiniment » plus efficace.

Alors quelle est la stratégie ?
.

  • Je vous donne la version de la Pravda de Kiev : L’objectif principal des sanctions occidentales contre la Russie est de rendre impossible le financement de la guerre,
  • Et plus loin : Une augmentation des dépenses militaires aurait dû réduire considérablement d’autres programmes et déstabiliser l’économie, mais jusqu’à présent, Moscou a réussi à éviter cela.
  • Dans un autre article nous avons : Plus l’establishment de Poutine perd de biens, plus vite ses représentants forceront les autorités à arrêter la guerre.

On peut donc le résumer :

.
Empêcher le financement de la guerre, déstabiliser l’économie pour mettre le peuple contre V. Poutine et inciter l’élite russe à se révolter. Un triptyque censé et adapté à une stratégie où l’armée ukrainienne est depuis le début considérée comme incapable de vaincre l’armée Russe sur le terrain. L’arrière Russe doit craquer pour obtenir le retrait de l’armée.
Le choix de ce schwerpunkt (on me pardonnera le terme allemand) fait de l’économie le champ de bataille principal. De l’efficacité des sanctions dépend le succès où l’échec de la guerre d’Ukraine.

Un an plus tard où en sommes-nous ?

.
La réponse est : Les Ukrainiens meurent en masse sous les coups de l’artillerie russe, les contre-offensives s’empalent sur les défenses russes et ceux-ci observent le matériel occidental brûler depuis leurs tranchées bien aménagées. Il serait donc essentiel de l’emporter au plan économique, constatons-le : nous en sommes loin ! Sur chaque point de la stratégie les Ukrainiens dressent un réquisitoire féroce.

Examinons maintenant chacun de ces thèmes, en commençant par le point crucial de l’assèchement du financement de la guerre.

.

La première constatation est que, avant le déclenchement de la guerre, la Russie disposait d’une réserve financière conséquente :

« Dans les années qui ont précédé l’invasion à grande échelle, le Kremlin a placé une partie de ces revenus dans le Fonds national de richesse (NWF). Les fonds qui y sont détenus ont atteint 183 milliards de dollars. »

Ces réserves servaient de rempart contre les secousses économiques. Il est important de noter qu’aucune mention n’a été faite d’une confiscation ou d’un gel de ces actifs. Cependant, les Ukrainiens avancent une autre perspective :

« Les pays occidentaux ont gelé des dizaines de milliards de dollars en yachts et villas appartenant à l’élite russe. Au total, les alliés de l’Ukraine ont bloqué des actifs privés russes d’une valeur totale de 58 milliards de dollars. »

En se fondant sur les rapports officiels russes d’avant-guerre, il avait été estimé que les sanctions pourraient geler jusqu’à 300 milliards de dollars d’actifs. Les Ukrainiens suivent de près ces chiffres, car la reconstruction de leur pays en dépend. Par conséquent, il est peu probable qu’ils aient sous-estimé ces montants. Malgré une cible officielle de 300 milliards de dollars, le résultat de 58 milliards de dollars apparaît bien maigre. Cela pousse de nombreux pays à engager des procédures judiciaires pour prétendre qu’ils n’ont pas porté atteinte au droit de propriété. Ironiquement, l’effet moral escompté est probablement déjà en place. Nous en sommes arrivés à voler, à violer un droit fondamental, tout cela pour pratiquement rien. De plus, le Fonds national de richesse, qui aurait été une cible particulièrement alléchante, semble être resté intact. Il est important de noter qu’aucune trace de confiscation de ces actifs n’a été trouvée. Seules sont mentionnées des propriétés de luxe appartenant à des oligarques, ainsi que des comptes liés à RT, ajoutant ainsi une couche de censure à cette situation ignominieuse.

Examinons maintenant les excédents commerciaux russes des années précédant 2017. En additionnant les valeurs annuelles, nous pouvons estimer les réserves. Toutefois, il convient de prendre en compte la possibilité d’une réduction de ce montant due à des dividendes ou à des services financiers. Malgré les efforts de Poutine, la fuite des capitaux constituait un problème majeur avant son arrivée au pouvoir, et il est peu probable qu’il ait réussi à l’endiguer totalement.

Il est évident que le financement de la guerre pourrait être maintenu pendant un certain temps uniquement à partir de ces réserves. Cependant, une question cruciale se pose : qu’en est-il du commerce ?

L’industrie du gaz et du pétrole semble être en bonne santé, comme en témoigne le graphique présenté par la Pravda :

À l’heure actuelle, un euro équivaut à environ 100 roubles, ce qui signifie que chaque mois génère des revenus compris entre 4 et 7 milliards d’euros. Une perspective favorable pour la balance commerciale française.

Cependant, le mythe courant prétend que les Russes vendent leurs produits à prix réduits. La Pravda remet en question cette idée et propose une analyse des cours du baril d’Ural (pétrole russe) comparé à celui du Brent (marché occidental).

On avance que le pétrole russe est vendu à prix réduit pour évincer la concurrence et compenser aux clients les risques liés aux sanctions. Au fur et à mesure que le pétrole russe gagne du terrain sur le marché asiatique, la décote par rapport au Brent diminue. Si cette différence était de 37 dollars américains le baril au début de l’invasion, elle est maintenant de 19 dollars. Une réduction de 40 % en seulement cinq derniers mois.

Il est clair que le risque de sanctions pour les acheteurs est désormais intégré dans le prix, ce qui reflète une perte d’efficacité de la dissuasion occidentale. Le prix du baril russe, malgré la décote, a même augmenté. La hausse des prix mondiaux et la diminution de la décote ont contribué à une augmentation de 35 % du prix du baril de pétrole de l’Oural depuis mars 2023.

Avant-guerre, les Russes annonçaient équilibrer leur budget à 40 dollars le baril. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes pétroliers. Prends ça Poutine, 25$ de rabais par baril.
Le prix reste lui confortable au-dessus de septembre 2021

L’Union européenne a cherché à réagir en imposant des limites, et l’article de la Pravda détaille les diverses méthodes de contournement. Malheureusement, les résultats sont encore insuffisants.

En ce qui concerne le gaz, qui n’est pas soumis à des sanctions, il est vrai que nous avons réduit nos importations. Ces chiffres sont désormais cinq fois inférieurs aux volumes d’avant l’invasion, mais le prix moyen a augmenté. Par conséquent, la multinationale russe de l’énergie Gazprom est en mesure de reconstituer le trésor russe de 100 à 150 milliards de roubles (environ 1,1 à 1,6 milliard de dollars par mois).

De plus, même si l’approvisionnement en gazoduc devait finalement être interrompu, la Russie possède toujours une capacité d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) considérable, disponible pour être livrée n’importe où dans le monde. Les projets futurs visent à accroître la capacité de ses terminaux GNL et à devenir le quatrième plus grand exportateur mondial de gaz naturel liquéfié.

Ainsi, à la lumière de ces éléments, il est clair que le financement de la guerre n’est nullement en danger. En 2023, la Russie prévoit de dépenser 29 362 milliards de roubles, soit l’équivalent de 9 milliards de dollars provenant du budget fédéral. Même l’effet secondaire escompté des sanctions n’a pas été atteint jusqu’à présent. Une augmentation des dépenses militaires aurait normalement dû entraîner d’importantes réductions dans d’autres programmes et perturber l’économie, mais Moscou a réussi à éviter cette situation.

Il est compréhensible que les Ukrainiens, partis en guerre avec l’espoir de voir l’économie russe s’effondrer, ressentent de la frustration. Alors qu’ils paient le prix fort sur le terrain, le plan visant à affaiblir l’économie russe échoue. La Russie parvient à financer ses opérations militaires tout en absorbant le choc économique.

Déstabiliser l’économie russe

.
On pourrait avancer l’argument des importations, sachant que l’économie russe est sensible à celles-ci, et détenir de l’argent liquide ne garantit pas sa capacité d’utilisation. Comme l’expriment les habitants de Kiev :

« Trouver quelques milliards de dollars n’est que la première étape. Pour mener la guerre, les Russes doivent avoir accès à l’électronique occidentale. Sans elle, la production de missiles, d’avions, de drones, de radars et de chars modernes russes est impossible. »

Cependant, la Pravda nuance cette idée en avançant que :

« Le complexe militaro-industriel russe n’a pas subi de catastrophe en raison des sanctions. »

Ainsi, malgré les sanctions, les Russes continuent de fabriquer leurs armements. Pourquoi ? D’abord, parce que la production d’armes conventionnelles est autonome. Comme l’explique Archil Tsintsadze, expert en défense et ancien attaché militaire géorgien aux États-Unis :

« Pour les armes et équipements plus basiques pour la défense, la Russie a toujours eu un cycle de production complet. »

L’idée que le complexe militaro-industriel russe est toujours opérationnel est soutenue par les statistiques officielles russes. Lidia Lisovska, analyste du projet ANTS, ajoute :

« La production en Russie de jumelles, monoculaires et autres dispositifs optiques a augmenté de 73 % au premier trimestre 2023 par rapport à la même période en 2022. La production de radars, de produits de radionavigation, d’équipements de télécommande, d’ordinateurs, de moteurs électriques, de générateurs, de batteries, de vêtements spéciaux et de chaussures a augmenté de 40 à 110 %. »

Cela suggère un remplacement des produits précédemment importés de pays occidentaux et une augmentation de la production pour les besoins militaires.

En fin de compte, bien que les sanctions et la guerre aient un impact économique sur la Russie, cet effet ne se fait sentir que sur le long terme. Cependant, comme l’a dit Keynes : « À long terme, nous serons tous morts. » Malheureusement, pour l’Ukraine, il est probable que tous les Ukrainiens ne vivent pas jusqu’à ce « long terme ».

Il est légitime de se demander si les pays occidentaux sont prêts à supporter des années d’inflation et de diminution du pouvoir d’achat pour soutenir Zelensky. Certains pourraient estimer que la guerre en Ukraine est une distraction bienvenue, masquant le rôle de l’expansion monétaire menée par nos banques centrales dans l’explosion des prix.

Le dernier espoir réside dans l’incitation des oligarques russes à se révolter. L’idée était que leur amour du luxe pourrait les pousser à mettre la pression sur les autorités pour mettre fin à la guerre. Cependant, les premiers mois de la guerre ont montré que cette hypothèse était vaine. La guerre est finalement profitable pour eux, et les responsables et oligarques russes ont réussi à compenser leurs pertes.

En conclusion, les sanctions ont échoué à atteindre leur objectif stratégique de provoquer l’effondrement militaire russe par le biais économique. La liste des pays ne participant pas aux sanctions révèle que de nombreux acteurs mondiaux refusent d’y adhérer. Par conséquent, au lieu d’exclure la Russie, nous nous excluons nous-mêmes du marché mondial, et les sanctions se transforment en une farce, comme en témoignent les Européens :

On ne saurait mieux dire… Pendant que des vies sont perdues sur le front, dans une guerre sans issue, l’Occident alimente également la corruption en encourageant l’élite ukrainienne à persévérer dans des combats vains.

Il est grand temps de mettre un terme à cette situation et de traduire en justice les responsables occidentaux qui ont contribué à ce désastre. Sinon, les peuples de l’Occident seront en partie responsables des erreurs commises par leurs dirigeants.

Ni pardon, ni oubli !

Jules Seyes pour Le Média en 4-4-2

Chères lectrices, chers lecteurs,

Soyez acteur du changement en soutenant un journalisme véritablement indépendant et de qualité en vous abonnant à notre média financé par les dons de personnes comme vous.

Accédez à des contenus exclusifs
et soutenez notre indépendance

Abonnez-vous

partagez cet article !

Newsletter

La Boutique du 4-4-2

Géopolitique

Accédez à des contenus exclusifs et soutenez notre indépendance

Abonnez-vous

Accédez à des contenus exclusifs et soutenez notre indépendance

Abonnez-vous

Accédez à des contenus exclusifs et soutenez notre indépendance

Abonnez-vous