La contre-offensive ukrainienne pose la question de la survie de l’OTAN

mise à jour le 03/07/23

Essayons de prendre du recul par rapport à la boucherie en cours. Au-delà du massacre jusqu’au dernier Ukrainien, il convient de se rappeler que ce conflit est avant tout lié à des questions politiques. Les dieux punissent les mortels en exauçant leurs vœux, la vieille malédiction grecque a finalement la vie dure.


Les dirigeants occidentaux, alignés sur le quarteron de néoconservateurs au pouvoir à Washington voulaient piller la Russie. Seul souci, cet « immonde individu » nommé Vladimir Poutine avait redonné une colonne vertébrale au pays et sa faiblesse des années 1990 s’estompait chaque jour davantage.

Face à cette situation, deux stratégies étaient possibles :

  • Faire le dos, rond, attendre les conflits de succession au retrait de V.Poutine et jeter de l’huile sur le feu. Il fallait attendre et cette stratégie fut donc rejetée.
  • La seconde solution était de provoquer des troubles civils, les mandataires de type Navalny ayant, faute de véritable ancrage dans le pays, échoué, il fallait pourrir la situation. La guerre en Ukraine constituait un bon moyen en générant des pertes et surtout des sanctions économiques.

Les sanctions feront l’objet d’un second article, ici nous parlerons de l’aspect militaire. Inutile de revenir sur les opérations, la télévision les a relayées, l’idée est d’analyser les grandes tendances à l’œuvre pour tenter de comprendre les conséquences au-delà de ce conflit. Dans la dialectique de l’épée et du bouclier, nous vivons une période où tout ce qui dépasse du sol est en danger de mort rapide. Au contraire de la seconde guerre mondiale où chars et avions bénéficiaient d’une certaine immunité grâce à leur vitesse et leurs blindages, canons modernes et missiles se dressent devant eux comme un rideau de feu infranchissable.

L’Ukraine, de la contre-offensive en est une preuve éclatante. Seuls les missiles traversent encore le dispositif adverse ou des drones par attaques saturantes. Alors, on peut essayer de saturer avec des fantassins et des chars, il convient juste de se montrer prêt à payer le prix terrifiant d’une telle tactique. Même les banderistes y échouent.

Faute de moyens suffisants en artillerie, génie et antiaérien, l’Ukraine vient de tenter et le résultat est conforme aux attentes. Les Russes eux, ont l’option de disposer de riches dotations en munitions qui leur permettent de bombarder jusqu’à tuer les défenseurs des positions.
Là encore, les progrès de la fortification avec des tranchées creusées par de puissants moyens mécaniques, des abris enterrés en profondeur dans le sol rendent le coût matériel des tactiques de bombardement aussi très coûteux. Il devient encore plus difficile de tuer les défenseurs retranchés en 2023 qu’en 1916 à Verdun. Nous l’avons vu durant la bataille de Barkhmout, mais c’est une question de temps et de volume de feu.

Donc, oui, nous voilà revenus à 1914-1916, la guerre des tranchées par le miracle de la technique. Maintenant, il serait temps de corriger certaines perceptions erronées. L’histoire est cyclique, pas linéaire, donc revenir aux conflits d’attrition est normal, il s’agit d’une phase et la vérité d’aujourd’hui n’est pas forcément celle de demain. Dès maintenant, dans le monde entier, militaires et ingénieurs révisent les besoins, comment tirer une solution des moyens existants, comment en développer de nouveau. De cette émulation sortiront de nouvelles puissances militaires, de nouvelles armes et tactiques et la vérité dans dix ans sera différente de celle d’aujourd’hui.

En attendant, nous devons vivre avec le monde d’aujourd’hui, la stratégie d’armement de l’OTAN de frappe de précision combinée à des vecteurs invulnérables vient de connaître un cinglant échec. Tous nos développements tactiques des dernières décennies sont morts. Quelle est la différence entre un Leclerc/Léopard et un AMX 30 face à un Kornet ? La réponse est : faible et le canon d’un AMX 30 suffit pour tuer les défenseurs de la tranchée. On a beaucoup glosé sur la tendance russe à ressortir des armes « obsolètes » des dépôts, mais un T55 utilisé comme canon d’assaut ou embossé tire aussi bien des obus qu’un T90. Le gain d’efficacité est mineur.

L’OTAN et l’occident parfois dans la doctrine technologique se sont laissés entraîner dans un mirage et ont oublié que le nombre compte. La guerre en Ukraine sera le révélateur de nos illusions perdues. Nos conflits contre les Djihadistes avaient déjà révélé certaines faiblesses. Tuer un fanatique en haillon et sandalettes dont le seul équipement était une Kalash coûtait plusieurs millions d’Euros. Il y a trop de cinglés dans le monde pour qu’un tel coût soit abordable. Nous allons donc devoir redévelopper nos arsenaux avec humilité et une sérieuse remise en cause de nos dogmes et comme lors de l’invention du Dreadnought, tout le monde repart de zéro.

Dès lors, les équilibres militaires sur lesquels reposaient les alliances sont caducs. Les armées US sont vaincues par obsolescence. La Navy confrontée aux missiles affronte le même dilemme. Restent les armes nucléaires US, mais peut-on encore imaginer les USA sacrifier New York pour Varsovie ?

Nous allons donc assister à la montée de plusieurs facteurs :

  • La seule garantie de sécurité valide devient l’arme nucléaire montée sur des vecteurs missiles rapides et performants. Nombre de pays vont sûrement s’équiper et le monde sera sous cet angle moins sûr qu’avant-guerre. Nous aurions dû y réfléchir avant de nous lancer dans cette affaire.
  • Les alliances conventionnelles devront se refaire, sur la base d’intérêts de sécurité partagés en commun. Cela signe l’arrêt de mort de l’OTAN si la NSA ne le sauve pas grâce à de gentils dossiers sur les décideurs.

Développons la seconde branche : L’OTAN reposait sur deux garanties : le parapluie nucléaire US dont tous les pays connaissent les trous et la possibilité d’un renfort conventionnel massif de la part de l’armée US. Or, celle-ci est usée dans toutes ses composantes. Le technologisme a tué la Navy et l’Air Force. Les nouveaux PA (Classe Ford), destroyer (Zumwalt) et avions (F35) sont largement périmés avant d’avoir combattu. Inutile d’avoir des armes si chères pour constituer une poignée de cibles pour les missiles. Il faudra désormais du feu. Tout l’arsenal US est donc bon pour la poubelle. La France avec son Rafale est paradoxalement dans une meilleure situation avec un avion perdable capable d’emporter une lourde charge car il n’a pas sacrifié au furtif.

Nos armées auront besoin d’hommes et de plateformes en nombre le temps de trouver une solution, nous allons devoir réapprendre la production de masse. Surtout, l’échec de l’offensive ukrainienne signe l’échec de la doctrine OTAN, les soldats engagés avec la formation occidentale n’ont pas bénéficié d’un avantage sur les Russes. Les moyens de renseignement ont échoué à trouver des failles dans la défense russe. Pourquoi alors tant d’investissements ? Pour que les analystes de la NSA ou du Pentagone puissent espionner dans les salles de bain ? L’œil du ciel a échoué et avec lui, un des principaux arguments US. Dés lors, pourquoi rester dans l’OTAN ?

Évidement, l’alliance a trop d’avantages pour les USA et ils feront tout pour maintenir le contrat désormais léonin. Que l’Europe reste sous leur dépendance contre une garantie de sécurité devenue illusoire. Le suicide actuel de l’Europe dans l’affaire des sanctions montre que cette option reste réaliste et la NSA est aujourd’hui le meilleur atout stratégique de cette alliance jusqu’au moment où un ménage sera fait au sein de nos élites.

La guerre en Ukraine va accoucher d’un monde nouveau, il ne sera pas meilleur, pas moins dangereux, au contraire, donc l’heure est venue d’y réfléchir pour le construire du mieux possible. Si nous échouons, alors, nous aurons les inconvénients de la reconstruction avec des puissances moyennes occupées à se quereller et ceux-ci dépasseront les conséquences des crimes des néoconservateurs.

Jules Seyes pour Le Média en 4-4-2


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