Mai 68 : L’éditorial de Georges Marchais contre les faux révolutionnaires comme Cohn-Bendit

mise à jour le 30/05/23

Éditorial de Georges Marchais, alors secrétaire à l’organisation, contre les gauchistes en mai 1968 (aujourd’hui tous fervents défenseurs du capitalisme) et le renégat Daniel Cohn-Bendit

Comme toujours lorsque progresse l’union des forces ouvrières et démocratiques, les groupuscules gauchistes s’agitent dans tous les milieux. Ils sont particulièrement actifs parmi les étudiants; à l’Université de Nanterre, par exemple, on trouve; les ‘maoïstes’, les ‘Jeunesses communistes révolutionnaires’ qui groupent une partie des trotskistes; le ‘Comité de liaison des étudiants révolutionnaires’ lui aussi à majorité trotskiste; les anarchistes; divers autres groupes plus ou moins folkloriques. Malgré leurs contradictions, ces groupuscules – quelques centaines d’étudiants- se sont unifiés dans ce qu’ils appellent ‘Le Mouvement de 22 Mars : Nanterre’ dirigé par l’anarchiste allemand Cohn-Bendit.

Non satisfait de l’agitation qu’ils mènent dans les milieux étudiants – agitation qui va à l’encontre des intérêts de la masse des étudiants et favorise les provocations fascistes – voilà que ces pseudo-révolutionnaires émettent maintenant la prétention de donner des leçons au mouvement ouvrier. De plus en plus on les trouve aux portes des entreprises ou dans les centres de travailleurs immigrés distribuant tracts et autre matériel de propagande.

L’HUMANITE

Ces faux révolutionnaires doivent être énergiquement démasqués car, objectivement, ils servent les intérêts du pouvoir gaulliste et des grands monopoles capitalistes. Un des maîtres à penser des gauchistes est le philosophes allemand Herbert Marcuse qui vit aux Etats-Unis. Ses thèses peuvent être résumées de la façon suivante: les partis communistes ‘ ont fait faillite’, la bourgeoisie a ‘intégré la classe ouvrière qui n’est plus révolutionnaire’, la jeunesse surtout dans les universités ‘ est une force neuve, pleine de possibilité révolutionnaire’ elle doit s’organiser ‘pour la lutte violente’. Bien entendu, les adeptes de Marcuse, chez nous, doivent tenir compte de la force, de l’influence du Parti Communiste Français et de la combativité de la classe ouvrière. Mais tout en y mettant des formes, ils portent leurs coups contre notre parti – et la CGT- et cherchent à mettre en cause le rôle fondamental de la classe ouvrière dans la lutte pour le progrès, la démocratie, le socialisme.

Les thèses et l’activité de ces révolutionnaires’ pourraient prêter à rire. D’autant qu’il s’agit, en général, de fils de grands bourgeois – méprisants à l’égard des étudiants d’origine ouvrière – qui rapidement mettront en veilleuse leur flamme révolutionnaire pour aller diriger les entreprises de papa et y exploiter les travailleurs dans les meilleures traditions du capitalisme. Cependant on se saurait sous -estimer leur malfaisante besogne qui tente de jeter le trouble, le doute, le scepticisme parmi les travailleurs et notamment les jeunes. D’autant que leurs activités s’inscrivent dans le cadre de la campagne anti-communiste du pouvoir gaulliste et des autres forces réactionnaires. De plus, des journaux, des revues, des hebdomadaires – dont certains se réclament de gauche- leur accordent de l’importance et diffusent à longueur de colonnes leurs élucubrations. Enfin et surtout, parce que l’aventurisme gauchiste porte le plus grand préjudice au mouvement révolutionnaire.

En développant l’anti-communisme, les groupuscules gauchistes servent les intérêts de la bourgeoisie et du grand capital.

Le Parti Communiste Français est le meilleur défenseur des revendications immédiates des travailleurs manuels et intellectuels. Il représente une force essentielle dans le combat pour éliminer le pouvoir des monopoles et de lui substituer un régime démocratique nouveau permettant d’aller de l’avant dans la voie du progrès social de l’indépendance nationale et de la paix. Il est le meilleur artisan de l’union des forces ouvrières et démocratiques et de l’entente entre tous les partis de gauche, condition décisive pour atteindre des objectifs. Sans le parti Communiste, il n’est pas véritable
gouvernement de gauche, il n’est pas de politique de progrès possible. Pour atteindre ses objectifs notre Parti Communiste fonde son action avant tout sur la classe ouvrière qui est la force sociale décisive de notre époque. La grande mission historique de la classe ouvrière est de liquider le capitalisme et d’édifier le socialisme, seule société véritablement humaine. Il en est ainsi parce que la classe ouvrière ne possède toujours aucun moyen de production, qu’elle est la classe la plus exploitée et par conséquent le seule classe véritablement révolutionnaire jusqu’au bout. Il en est ainsi parce que les conditions mêmes de développement de la production font que la classe ouvrière est la mieux organisée, la plus disciplinée et la plus consciente. Le pseudo-révolutionnaires de Nanterre et d’ailleurs auront beau faire, ils ne changeront rien à cette réalité historique. […] Nous devons aussi leur rappeler ces paroles d’Anatole France à l’intention des intellectuels: ‘ Pour combattre et vaincre nos adversaires rappelez-vous, citoyens, que vous devez marcher avec tous les artisans de l’émancipation des travailleurs manuels avec tous les défenseurs de la justice sociale et que vous n’avez pas d’ennemis à gauche.

Rappelez-vous que sans les prolétaires, vous n’êtes qu’une poignée de dissidents bourgeois et qu’unis, mêlés au prolétariat, vous êtes le nombre au service de la justice.

Lien : wmaker.net

Pour nuancer la déclaration de Georges Marchais : « Ces faux révolutionnaires doivent être énergiquement démasqués car, objectivement, ils servent les intérêts du pouvoir gaulliste et des grands monopoles capitalistes » Selon Olivier Germain-Thomas : « Les agents de la CIA à Paris et dans d’autres villes de province avaient pour instruction de faire tomber de Gaulle. »

« La brocante de Mai 68 et ouvertures » d’Olivier Germain-Thomas est publié aux Éditions Pierre-Guillaume de Roux.

Pourquoi ce parallèle entre Mai 68 et une brocante ?

Olivier Germain-Thomas : Dans une brocante, vous avez du bien et du pas bien. J’ai étudié le bouddhisme, j’étais assez loin de l’engagement politique et, au début, Mai 68 m’a plutôt amusé :  Faites l’amour, mais pas la guerre…  Ou Sous les pavés la plage… On est tous d’accord ! Mais j’ai très vite compris – j’avais quand même une petite expérience politique pour avoir fait la campagne de Charles de Gaulle pendant la présidentielle de 1965 – qu’il y avait derrière des trotskistes qui étaient très bien organisés. Au Parti communiste, les jeunes étaient plutôt séduits, mais le Parti communiste en lui-même a joué la carte de la stabilité, tout simplement parce qu’il faisait une analyse objective de la situation et le Parti communiste déteste les gauchistes. En plus, il n’avait pas envie de se faire déborder sur sa gauche. J’ai relevé dans un livre de Jacques Vendroux qu’à l’Assemblée nationale Waldeck Rochet lui a demandé de ne pas céder, ce qui n’était quand même pas mal de la part d’un communiste ! C’était une affaire très compliquée, que l’on simplifie un peu à l’occasion de ce cinquantenaire, comme s’il y avait des merveilleux révolutionnaires qui avaient toutes les qualités, le reste étant de l’ordre de la réaction. C’était beaucoup plus subtil.

Mais je n’avais pas envie de faire un livre d’anciens combattants sur ces souvenirs et j’ai voulu me projeter davantage dans l’avenir parce que j’ai eu la chance, à la suite de ces événements, de rencontrer André Malraux à plusieurs reprises et je parle évidemment de mon admiration pour lui. J’ai voulu aussi m’interroger sur le problème des racines, car les gens n’ont pas pris suffisamment conscience, face à la mondialisation, du malaise qui se crée sur toute la planète à cause de l’éradication des racines. Comment maintenir nos racines sans tomber dans ce que l’on pourrait appeler l’extrême droite ou des partis que je rejette totalement ? La question religieuse me semble capitale aujourd’hui. On voit la caricature de ce que peut donner une religion, nommons-la, de ce que peut donner l’islam quand il est habité par la violence, mais aussi par l’hindouisme. Je vais pratiquement chaque année en Inde et je vois les extrémistes hindous. Je vois également au Japon des extrémistes shintos. J’observe que face à cette mondialisation, il y a un raidissement sur des valeurs religieuses et j’essaie d’ouvrir des portes.

Au début, vous n’étiez qu’une petite poignée à vous opposer au mouvement de Mai 68. Pourquoi ce choix ?

Pendant quelques jours, j’ai été plutôt content, mais je me suis rapidement rendu compte que nous allions ébranler un pouvoir qui, à mes yeux, était extraordinaire. Il y avait eu le voyage de de Gaulle en Union soviétique, où il parle de la Russie éternelle, le discours de Phnom Penh, le discours de Montréal… Donc, soudain, la politique étrangère de la France prenait une dimension internationale magnifique. Je sentais qu’il y avait quelque chose qui revivait par rapport à notre histoire et, à cause de cette stupidité, l’effet d’entraînement des uns et des autres, ces étudiants risquaient d’ébranler ce régime. Donc, il fallait prendre ses responsabilités. Je les ai prises et je n’ai pas reçu un coup tout au long de ces journées, alors que j’ai pris la parole dans des amphithéâtres. On voulait simplement m’envoyer chez le psychanalyste…

Lorsque vous avez rejoint ce groupe d’opposants, vous étiez très peu nombreux dans un local et tout se faisait en bricolant. Finalement, vous étiez des marginaux…

C’était effectivement du bricolage ! Rue de Solférino, il y avait une association de soutien au général de Gaulle – je vous parle du bon côté de la rue – et nous n’étions qu’une poignée. Au sein du parti gaulliste, la plupart des apparatchiks étaient sous leur lit à ce moment-là, mais il y en avait quelques-uns qui résistaient, comme Charles Pasqua. Nous étions très peu, comme si, soudain, quelque chose se défaisait petit à petit, comme si cette Ve République, que nous pensions très solide, allait se défaire. Le général de Gaulle s’est trompé le 24 mai quand il a fait un discours qui est tombé à plat et il y a cette fameuse journée du 29 où il s’est ressaisi, ce qui a permis de retourner la situation et qui prouve bien que la situation n’était pas révolutionnaire. Connaissez-vous une révolution où un seul discours annihile la révolution ?

Certes, c’est facile à dire maintenant mais, à ce moment-là, tout le monde pensait que tout s’effondrerait…

On l’a vu puisqu’à partir du 13 mai il y a eu des millions de grévistes, avec des piquets très solides, et la majorité des jeunes se sont pris d’une espèce d’enthousiasme pour ce mouvement. J’imagine que des sociologues vont analyser en profondeur les raisons qui font que dans un pays qui était relativement prospère et stable, les choses se sont effondrées aussi vite, mais aussi pourquoi elles se sont redressées aussi vite…

Dans votre étude, vous soulignez que sans cultiver l’idée simpliste que les complots régissent l’histoire, il est néanmoins certain que la spontanéité du mouvement de Mai a été soutenue par les nombreuses et contradictoires forces hostiles à la politique de Charles de Gaulle. Certains estiment que les États-Unis et Israël ont été à l’origine de Mai 68. Qu’en pensez-vous ?

À l’époque, on accusait Cuba, ce qui est entièrement faux. On sait d’ailleurs que Fidel Castro envoyait d’excellents cigares à de Gaulle et qu’il avait plutôt de l’admiration pour lui. Je ne sais pas si c’était réciproque… Le Parti communiste ne souhaitait pas du tout le renversement de Charles de Gaulle, parce que le Parti communiste – tenu quand même par Moscou – était ravi de ses coups de pied à la présence américaine au Vietnam et aussi contre le dollar. Éric Branca a publié un livre basé sur des archives réelles et l’on voit très bien que les agents de la CIA à Paris et dans d’autres villes de province avaient pour instruction de faire tomber de Gaulle. Je ne dis pas qu’ils sont la cause de ce mouvement, mais ils en ont profité et ils ont mis de l’huile sur le feu. Maintenant, nous en avons la preuve.

Lire la suite d cette interview : http://www.gaullisme.fr/2018/04/21/les-agents-de-la-cia-avaient-pour-instruction-de-faire-tomber-de-gaulle/

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