Suède : taux de mortalité inférieur à celui de la plupart des pays d’Europe en 2020, malgré l’absence de confinement

mise à jour le 15/04/21

De nouvelles données européennes suggèrent que le choix du laisser-faire de la Suède à l’égard de la pandémie était loin d’être catastrophique.

Peu de personnes en 2020 ont passé autant de temps sous les feux de la rampe que Anders Tegnell, le meilleur épidémiologiste de Suède

Mais l’homme qui a forgé l’approche du laisser-faire de la Suède face au Covid-19, dès le début de la pandémie, affirme que de nouvelles données internationales révèlent une dure vérité au sujet des confinements décidés par les gouvernements.

« Je pense que les gens penseront probablement très soigneusement à ces fermetures totales, à quel point elles étaient vraiment efficaces », a déclaré Tegnell à Reuters dans une interview récente. « Elles ont peut-être eu un effet à court terme, mais lorsqu’on examine la situation tout au long de la pandémie, on devient de plus en plus suspicieux. »

Tegnell faisait référence aux données publiées par Reuters qui montrent que la Suède, qui a évité les confinements adoptés par la plupart des pays du monde, a connu une augmentation plus faible de son taux de mortalité que la plupart des pays européens en 2020.

Les données préliminaires de l’office de statistique de l’Union européenne Eurostat, compilées par Reuters, montrent que la Suède a enregistré 7,7 % de décès de plus en 2020 que sa moyenne des quatre années précédentes. Les pays qui ont opté pour plusieurs périodes de confinement strict, comme l’Espagne et la Belgique, ont respectivement connu une surmortalité de 18,1 % et 16,2 %.

Vingt et un des trente pays disposant de statistiques disponibles ont enregistré une surmortalité plus élevée que la Suède. Cependant, la Suède a fait moins bien que ses voisins nordiques, le Danemark enregistrant seulement 1,5 % de surmortalité et la Finlande 1,0 %. La Norvège n’a enregistré aucune surmortalité en 2020.

Toujours (plus) de justifications

Pendant près d’un an, la Suède a été au premier plan du débat sur la façon dont les gouvernements devraient réagir au coronavirus.

Des rapports publiés en avril dernier ont montré que, malgré les nombreuses critiques contre la décision de ne pas confiner totalement, le Covid-19 avait atteint ce que Tegnell a décrit comme un « plateau » en Suède.

« Si la classification de Tegnell se révèle exacte, ce sera une confirmation définitive de la bonne stratégie suédoise, qui a été largement dénoncée pour avoir résisté à la tendance mondiale d’imposer des décrets de confinements draconiens qui ont paralysé l’économie mondiale et créé des millions de chômeurs », selon l’agence Bloomberg.

Des mois plus tard, les données ont montré que la Suède avait réussi à « aplanir la courbe » contrairement à de nombreux points sensibles par le monde.

De nombreuses critiques sont remontées, comparant le taux de mortalité de la Suède à ses homologues nordiques, la Norvège et la Finlande, qui affichaient les taux de mortalité les plus faibles d’Europe. Toutefois, la Norvège et la Finlande ont adopté des politiques encore moins restrictives que la Suède la plupart du temps.

Les experts de la santé publique en Suède affirment que les données les plus récentes sont une preuve supplémentaire que la Suède a été l’un des rares pays à maîtriser le virus. « Certains croyaient qu’il était possible d’éliminer la transmission des maladies en mettant fin à la vie en société », a déclaré Johan Carlson, directeur de l’Agence de la santé publique de Suède. « Nous n’y croyions pas et nous avons eu raison. »

Les pandémies sont terribles et le Covid-19 est un virus violent. (Je l’ai moi-même eu récemment, et ce n’était pas une partie de plaisir. J’ai été gravement malade pendant des jours.) Mais les législateurs du monde entier ont fait deux erreurs de calcul graves lorsqu’ils ont décidé de limiter les libertés fondamentales et d’accepter un confinement.

D’abord, ils ont conclu qu’ils pouvaient contenir un virus grâce à une planification centrale. Ils ont échoué, comme le montrent de nombreuses études universitaires.

Deuxièmement, les décideurs ont oublié la réalité fondamentale des compromis, ce que l’économiste et politologue James Harrigan a reconnu au début de la pandémie.

En période de crise, les gens veulent que quelqu’un fasse quelque chose et ne veulent pas entendre parler de compromis. C’est le terrain fertile pour de grandes politiques dictées par le dicton « quoi qu’il en coûte, si cela sauve une seule vie ». Le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, a invoqué le fameux dicton pour défendre sa stratégie de fermeture. Cette façon de penser a fait écho dans tout le pays, des conseils de comté aux maires, en passant par les conseils scolaires, la police et le clergé pour justifier fermetures, couvre-feux et distanciation sociale.

Les gens rationnels comprennent que ce n’est pas ainsi que le monde fonctionne. Peu importe que nous les admettions ou pas, des compromis existent.

Ce que Harrigan et Davies voulaient dire, c’est que les politiques sanitaires ne fonctionnent pas toujours comme prévu. Elles engendrent souvent une foule de conséquences imprévues, qui peuvent être néfastes ou même destructrices.

« Chaque action humaine a des conséquences à la fois voulues et imprévues », ont expliqué Antony Davies et James Harrigan. « Les êtres humains réagissent à toutes les règles, à tous les règlements et à tous les ordres que les gouvernements imposent, et leurs réactions donnent des résultats qui peuvent être très différents de ceux que les législateurs ont prévus. »

L’une des raisons pour lesquelles la Suède a enregistré un taux de mortalité inférieur à celui de la plupart de ses homologues européens est que ses dirigeants l’ont anticipé. En conséquence, la Suède a évité une grande partie des dommages collatéraux associés aux confinements, ce qui inclue la détresse économique, l’augmentation des suicides, la dépression causée par l’isolement social, l’abus de drogues et d’alcool et d’autres conséquences néfastes pour la santé publique.

Les États-Unis ne l’ont pas fait. Aux États-Unis, par exemple, la santé mentale a atteint l’an dernier son plus bas niveau depuis 20 ans. Le CDC signale une forte hausse des dépressions chez les jeunes. Il y a eu des pics de suicide, des overdoses de drogue

À l’échelle mondiale, nous avons observé des tendances semblables. Le suicide chez les enfants augmente partout dans le monde, ont récemment déclaré des médecins à lAssociated Press.

« Il s’agit d’une épidémie internationale, mais pas seulement d’un point de vue viral », a déclaré le Dr David Greenhorn, qui travaille à lunité d’urgence de l’infirmerie royale de Bradford, en Angleterre. « Dans la vie d’un enfant de huit ans, un an, c’est vraiment, vraiment, très long. Ils en ont assez. Ils ne voient pas la fin. »

Ça me fend le cœur. C’est d’autant plus exaspérant que la haute direction de la santé publique des États-Unis a reconnu dès le début de la pandémie que des confinements prolongés pourraient causer « des dommages irréparables ».

« Nous ne pouvons pas rester enfermés pendant aussi longtemps sans provoquer des dommages irréparables et en subir des conséquences imprévues, y compris celles sur la santé », a déclaré l’an dernier à CNBC le Dr Anthony Fauci, le plus grand spécialiste des maladies infectieuses du pays.

Fauci avait raison. Malheureusement, contrairement à Tegnell, il n’avait pas le courage de ses convictions. Et les Américains en ont payé le prix.

– Source : Sweden Saw Lower Mortality Rate Than Most of Europe in 2020, Despite No Lockdown (26 mars 2021)
– Traduit par Tanguy pour Le Média en 4-4-2

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