« Je crois que les banques sont plus dangereuses pour nos libertés que de multiples armées étrangères qui seraient massées à nos frontières. Si le peuple américain par malheur autorisait ces institutions à contrôler l’émission de monnaie, les banques spolieraient les citoyens de leurs propriétés d’abord par l’inflation ensuite par la déflation jusqu’à ce que leurs enfants se réveillent sans toit sous lequel s’abriter et ceci dans le continent que leurs pères avaient conquis. Le droit d’émettre de la monnaie doit être enlevé aux banques et rendu au peuple à qui il appartient. »
Thomas Jefferson
Un rappel méthodologique et historique s’impose ici. De manière générale, il existe deux sortes de banques :
. Les premières, les banques de dépôts, ont des agences de proximité, encaissent les dépôts des fourmis travailleuses que nous sommes et les prêtent avec beaucoup de précaution à ceux qui veulent acheter un appartement ou financer leur entreprise. Autrefois, on les appelait les banques 9-6-3… Au bureau à 9 heures, on prêtait à 6% et à 3 heures, on était au golf. Il n’y avait rien de plus conservateur et de plus tranquille que ces banques-là et ce sont elles que les Français ont encore à l’esprit quand ils évoquent la notion de banque.
. Et puis il y a un deuxième type de banque : les «banques d’affaires». Naguère, il était convenable de baisser le ton de sa voix quand on en parlait et de montrer une grande révérence vis-à-vis de ces institutions (j’ai commencé ma carrière dans l’une d’entre elles en France). Celles-ci ne recevaient pas de dépôts et travaillaient sur leurs fonds propres. En général, elles n’étaient pas cotées en Bourse et étaient détenues par des «associés», souvent de la même famille (Rothschild, Lazard, etc.). Ces banques étaient le cœur même du capitalisme, la vraie salle des machines, l’endroit où des fortunes immenses se faisaient ou se défaisaient en quelques heures…
Ces banques portaient sur leurs fonds propres des positions énormes dans les marchés, organisaient des OPA ou les conseillaient et dans l’ensemble prenaient des risques considérables. Comme ces risques étaient pris avec l’argent des associés, il semblait tout à fait normal et logique que ceux-ci exercent un contrôle féroce sur ces prises de risque, car ils savaient fort bien que si les choses tournaient mal, ils allaient faire faillite et se retrouver ruinés. Il n’était pas rare, en effet, que les associés soient responsables sur l’ensemble de leur fortune personnelle en sus et au-delà de ce qu’ils avaient investi comme capital dans la banque.
En résumé, les premières institutions s’apparentaient à un bureau de poste et les deuxièmes à un casino !
Après la crise de 1929, le législateur américain, dans sa grande sagesse, décida en 1938 d’adopter le Glass Steagall Act, qui précisait que ces deux types d’activités devaient être exercés dans des institutions différentes et ne pouvaient pas avoir de rapport entre eux. Ce système fonctionna à la satisfaction générale jusqu’en 1999 où, sous l’énorme pression des banques commerciales en général et de Citicorp (M. Rubin) en particulier, le Glass Steagall Act fut aboli, autorisant de ce fait la fusion du bureau de poste et du casino. De cette autorisation vient la plus grande partie de nos malheurs actuels.
Le plus paradoxal est que cette fusion fut organisée par une administration démocrate, c’est-à-dire de gauche, l’administration Clinton, sous la conduite du ministre des Finances de l’époque Larry Summers, principal conseiller économique du président Obama, et que la bombe à retardement ainsi montée a explosé à la fin de l’administration Bush, dont il faut dire, pour être honnête, que son incompétence économique sous la conduite de M. Paulson (le successeur de M. Rubin chez Goldman Sachs) a dépassé l’entendement.
En déréglementant le crédit, les autorités américaines ont profondément changé les signaux que le marché recevait. Ces autorités ont commis une erreur à la fois politique, économique et morale.
Politique : le pouvoir de créer de la monnaie est considérable,car l’argent (papier) ne coûte rien à créer. Les autorités se sont rendues responsables d’une immense erreur conceptuelle en privatisant un bien par nature publique, le crédit, sans se donner les moyens de contrôler cette nouvelle forme de création monétaire. Économique, parce qu’elles accroissaient la fragilité du système à terme, en mettant en danger les dépôts des épargnants sans que ceux-ci soient consultés en amont.
Morale, parce que l’échelle des rémunérations s’est alors déplacée de façon insensée. Autant il était moral que les banquiers d’affaires d’autrefois, qui risquaient toute leur fortune, aient une rentabilité élevée, autant il est incompréhensible que des salariés touchent massivement des bonus calculés sur des profits comptables purement fictifs et dont l’expérience a prouvé qu’ils pouvaient disparaître rétroactivement. Mais tous ces salariés et toutes ces institutions étaient parmi les plus gros pourvoyeurs de fonds des campagnes électorales tant démocrates que républicaines…
« Je crois que les banques sont plus dangereuses pour nos libertés que de multiples armées étrangères qui seraient massées à nos frontières. Si le peuple américain par malheur autorisait ces institutions à contrôler l’émission de monnaie, les banques spolieraient les citoyens de…
— Charles Gave Officiel-Institut des Libertés (@IdLibertes) August 20, 2024
Charles Gave sur son compte X.
Pas encore de commentaire sur "La prophétie de Thomas Jefferson sur les banques : Le bureau de poste a fusionné avec le casino !"