Dans le dernier épisode de la saga médiatique opposant Jean-Michel Aphatie à Cyril Hanouna, le niveau des accusations a atteint des sommets vertigineux de manipulation. Tout a commencé par un simple tweet du journaliste de « Quotidien » où il écrivait, en commentaire d’une émission d’Europe 1 animée par Hanouna : « Hanouna visiblement au bord du gaz. Disons qu’Europe 1 a bien changé. Étonnant, non ? » Une expression qui, en d’autres circonstances, aurait sans doute soulevé un haussement d’épaules tout au plus, mais qui s’est vue ici interprétée par les défenseurs d’Israël et de la cause sioniste comme un sous-entendu antisémite aussi retentissant qu’une alarme d’incendie.
Je viens d’écouter une demi heure lunaire sur @Europe1 @Cyrilhanouna et ses chroniqueurs ont dénoncé la « moraline » et la « condescendance » de @franceinter « Je n’en peux plus » a dit Hanouna visiblement au bord du gaz, une auditrice menaçant même de quitter la France si la…
— jean-michel aphatie (@jmaphatie) November 7, 2024
Liberté d’expression sous condition : Les mots piégés
Dès la publication de ce tweet, la machine de l’indignation s’est mise en marche. Hanouna et ses chroniqueurs ont pris le relais pour dénoncer le choix des mots d’Aphatie, qui serait, selon eux, une attaque déguisée visant la communauté juive. Parce que, bien sûr, dire « au bord du gaz » en France en 2024 n’a rien de banal. Le mot « gaz » deviendrait ainsi l’équivalent d’un juron tabou, un mot qu’il faudrait bannir du vocabulaire courant pour éviter tout amalgame. Or, à en croire les défenseurs d’Hanouna, Aphatie aurait sciemment choisi cette formulation pour égratigner la sensibilité juive et, par extension, insinuer des idées sinistres.
Jean-Michel Aphatie est accusé d’antisémitisme pour un message dans lequel il écrit
« Hanouna visiblement au bord du gaz »pic.twitter.com/zgJl1v8SQi
— Albert Nuvo (@albert_NUVO) November 8, 2024
La théorie du complot des expressions…
Cyril Hanouna, visiblement exaspéré, s’insurge dans son émission phare « Touche Pas à Mon Poste ». « Son mot a été bien recherché, » martèle-t-il, « Il aurait pu dire au bord du gouffre, au bord du précipice. Mais non, il a choisi “au bord du gaz”. Ce n’est pas un hasard, il a fait exprès ! » Hanouna en serait presque à embaucher une équipe de sémanticiens pour analyser chaque syllabe des propos d’Aphatie.
La question, pour un observateur extérieur, est simple : jusqu’où ira-t-on pour tordre le sens des mots et en faire des armes d’accusation ? Après tout, l’expression « au bord du gaz » est une métaphore largement utilisée dans le langage populaire pour décrire une détresse intense. Elle signifie littéralement « être au bord du suicide » selon Aphatie lui-même, une définition tout à fait correcte dans le registre du langage courant. Pourtant, cette explication n’est pas jugée satisfaisante par les censeurs.
Une menace bien réelle : Les mots de Hanouna
Là où l’ironie s’intensifie, c’est lorsque l’on compare la tempête provoquée par les mots d’Aphatie avec le peu de bruit que font certains propos directs et menaçants de Cyril Hanouna lui-même. Dans une altercation avec Thomas Guénolé, Hanouna n’hésite pas à affirmer : « Quand je parle, on se tait ! Vous ne pourrez jamais travailler ailleurs quand je vais vous virer. » Cette menace explicite, qui vise directement la carrière d’un homme, passe pourtant sans provoquer la même réaction outrée que le tweet d’Aphatie. Apparemment, une expression devenue taboue suffit à s’attirer les foudres, tandis qu’une menace de censure aussi directe ne fait guère de vagues.
Hanouna menace Thomas Guénolé: « Quand je parle, on se tait! Sinon, vous ne pourrez jamais travailler ailleurs quand je vais vous virer » pic.twitter.com/5SE2bQeSGK
— Oumma.com (@oumma) November 1, 2024
Quand la paranoïa sioniste devient un outil d’auto-censure
Ce spectacle révèle une autre dimension plus inquiétante. En brandissant la carte de l’antisémitisme à la moindre évocation du mot « gaz », une certaine frange de défenseurs d’Israël semble vouloir asphyxier tout discours critique, même humoristique ou indirect, qui toucherait aux personnalités juives médiatisées. Une technique de disqualification aussi puissante que simpliste : réduire tout commentaire déplaisant à une expression de haine. Résultat : si vous êtes un journaliste non suspecté d’antisémitisme et que vous employez ce genre de termes, attendez-vous à être lynché en place publique.
La chasse aux sorcières 2.0 : une instrumentalisation cynique
Ce qui devient ici risible – et malheureusement tristement absurde – c’est de voir comment certains défenseurs d’Israël cherchent à dépeindre le simple choix de mots comme une attaque frontale contre une communauté entière. Tout cela, bien entendu, pour renforcer leur propre position de victimes et faire taire les critiques. Mais cette « moraline » – pour reprendre le terme d’Aphatie – finit par perdre de son impact. Plus on crie au loup, moins les gens écoutent.
Dans un monde idéal, les expressions devraient rester des expressions et les mots devraient garder leur sens sans être détournés pour servir d’armes politiques. Mais, visiblement, pour certains, tout est prétexte à accuser et à discréditer. Un mot mal interprété, un tweet malheureux, et c’est la réputation d’un journaliste qui part en fumée.
…et quand je vais acheter ma bonbonne de gaz (butane ou propane) dans un magasin, c’est un acte antisémite ? Et le vendeur, il est aussi antisémite ?