« Bruno casse-toi »
« Bruno casse-toi », « Bruno pas le bienvenue », « ministre de la faillite », « il n’y a que les milliardaires pour kiffer Le Maire »… Plusieurs tags peu élogieux, et même des murs entiers recouverts d’inscriptions, ont accueilli l’ancien ministre à l’Université.
HEC Lausanne : une des meilleures universités
À la question Est-ce que HEC Lausanne est une bonne université ? comme on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, l’Unil répond : « Marquée par le passage des deux grands économistes Léon Walras et Vilfredo Pareto, la faculté des hautes études commerciales de l’Université de Lausanne, est l’une des plus importantes facultés de management et d’économie en Suisse, et figure parmi les meilleures institutions dans les classements mondiaux… »
Léon Walras a publié neuf gros volumes de plus de 800 pages et pas moins de 1,5 kg chacun, bien pesé. Ils traitent de l’économie politique et sociale et de la théorie mathématique de la richesse sociale (entre autres). Respect ! Vilfredo Pareto a écrit 12 volumes de sociologie et d’économie. Le dernier, Traité de sociologie générale, a 1818 pages. On s’incline.
Quel est le parcours de Bruno Le Maire ?
Études secondaires chez les jésuites au lycée Saint-Louis-de-Gonzague dans le XVIe arrondissement de Paris, lycée dirigé par sa mère (oui, juste le même établissement qui a accueilli Brigitte Trogneux après le scandale du lycée de la Providence d’Amiens !), maîtrise de lettres sur La statuaire dans À la recherche du temps perdu. Premier à l’agrégation de Lettres modernes, il n’enseignera pourtant que deux ans. Ensuite Sciences Po, l’ENA, et hop ! une carrière politique classique : parachutage, emploi fictif, un coup à droite, un coup au centre, ministre de ci et de là, propositions selon son cœur : suppression de l’Impôt sur la Fortune, réduction des indemnités chômage, etc. Sans oublier sa mémorable contribution à la littérature française érotique (Le Ministre, Fugue américaine), sentimentale (Paul, une amitié, 160 p., 100 g) et autre (La voie française, 160 p., 186 g). Par rapport à Léon Walras et Vilfredo Pareto, il ne fait pas le poids.
Un diplôme politique au temps du fascisme
En 1937, l’Université de Lausanne avait attribué un doctorat honoris causa à Benito Mussolini lequel n’avait qu’un diplôme d’instituteur, mais la Suisse ne croyait qu’à moitié à la promesse de Hitler : « Dans tous les cas, nous respecterons l’inviolabilité et la neutralité de la Suisse ».
Après réflexion (en 1987 et 2020), l’Université de Lausanne a décidé de maintenir le doctorat honoris causa remis très politiquement à Mussolini « pour avoir conçu et réalisé dans sa patrie une organisation sociale qui a enrichi la science sociologique et qui laissera dans l’histoire une trace profonde ».
Une appréciation qui date de 1937, mais qui n’a pas été effacée… Avec une certaine hypocrisie, la direction de l’université a quand même condamné cette distinction académique sans l’annuler pour autant. En compensation, « une série d’actions mémorielles ont été prévues en avertissement permanent des dérives idéologiques auxquelles toute institution – à commencer par l’UNIL elle-même – est exposée en tout temps ».
Une nomination politique au temps de l’Union européenne
Bruno Le Maire a largement déployé les preuves de son expertise (« J’ai sauvé l’économie française »)… en ajoutant 1 000 pauvres petits milliards à la dette existante.
Sa nomination n’est donc pas plus méritée que la distinction de Mussolini. Les actions mémorielles n’ont pas évité ce dernier faux pas à l’université de Lausanne. Frédéric Herman, son recteur, parie peut-être sur une carrière européenne de Bruno Le Maire ? La Suisse pourrait ainsi bénéficier à nouveau des financements pour la recherche du programme Horizon Europe dont elle a été exclue. On essaie de comprendre.
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