Non, Benjamin Netanyahou n’a pas droit à une immunité contre la CPI

Jean-Noël Barrot affirme que le Premier ministre israélien pourrait être protégé par une immunité... mais c'est totalement faux ! En réalité, les chefs d'État, même non signataires du Statut de Rome, ne bénéficient pas d’immunité pour des crimes internationaux graves.

mise à jour le 27/11/24

L’immunité des chefs d’État ne s’applique pas aux crimes graves.

Récemment, Jean-Noël Barrot a affirmé que Benjamin Netanyahou pourrait bénéficier d’une immunité contre un éventuel mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), invoquant notamment le fait qu’Israël n’est pas signataire du Statut de Rome. Une déclaration qui mérite d’être corrigée : aucun fondement juridique solide ne soutient cette affirmation. Voici pourquoi cette position est totalement erronée.

La CPI : une juridiction internationale au-dessus des immunités

En droit international, les chefs d’État bénéficient généralement d’une immunité personnelle pendant leur mandat, les protégeant contre des poursuites judiciaires devant des juridictions nationales. Cependant, cette règle ne s’applique pas aux crimes graves jugés par la CPI, tels que :

  • Les crimes de guerre,
  • Les crimes contre l’humanité,
  • Le génocide.

Depuis sa création en 2002, la CPI a clairement affirmé que les immunités des chefs d’État en exercice ne les protègent pas. L’article 27 du Statut de Rome stipule explicitement que :

  • Aucune fonction officielle d’une personne, en particulier celle de chef d’État ou de gouvernement, ne la soustrait à la compétence de la Cour, ni ne l’exempte de l’obligation de rendre compte pour des crimes relevant de la compétence de la Cour.
  • Les immunités ou règles de procédure spéciales qui peuvent s’attacher à la qualité officielle d’une personne, en vertu de la législation nationale ou internationale, n’empêchent pas la Cour d’exercer sa compétence.

Cet article établit clairement que les dirigeants, qu’ils soient chefs d’État ou responsables d’un gouvernement, ne bénéficient pas d’immunité devant la Cour pénale internationale lorsqu’il s’agit de poursuites pour des crimes graves. C’est sur cette base que des mandats d’arrêt ont été émis contre Omar el-Béchir, ancien président du Soudan, et d’autres dirigeants en exercice.

Statut de Rome de la Cour pénale internationale

Selon Craig Mokhiber, avocat des droits de l’homme, militant pour la justice et ancien membre de l’ONU :

« Non, la France, vous n’êtes pas autorisée à accorder l’immunité aux auteurs israéliens de crimes. L’article 27 de la Convention de Rome refuse une telle immunité, et l’article 98 ne vous accorde aucune exception de ce type. Son but est de protéger les obligations ordinaires, telles que celles qui s’appliquent aux locaux diplomatiques ou aux accords préexistants sur le statut des forces. Les mandats d’arrêt Netanyahu et Gallant concernent les règles de jus cogens et erga omnes qui sont des obligations plus élevées (les plus élevées) et, dans une situation où la conduite criminelle est en cours, déclenchent des devoirs plus élevés de votre part. Vous êtes également liée par la Convention sur le génocide et les ordonnances provisoires de la CIJ. Et l’ONU a depuis longtemps rejeté l’octroi d’accords d’impunité dans les négociations de paix. Votre pacte avec le diable ne tiendra pas. »

Le fait qu’Israël ne soit pas signataire du Statut de Rome ne le protège pas

Il est vrai qu’Israël n’a pas ratifié le Statut de Rome, ce qui signifie qu’il n’a pas explicitement accepté la compétence de la CPI. Mais cela ne garantit pas une immunité pour ses ressortissants dans les cas suivants :

  1. Crimes commis sur le territoire d’un État partie :
    La Palestine, reconnue comme État partie par la CPI depuis 2015, a délégué à la Cour la compétence pour enquêter sur des crimes présumés commis sur son territoire, y compris par des Israéliens.
    Cela inclut les actions militaires dans les territoires occupés, comme Gaza ou la Cisjordanie.
  2. Résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU :
    Bien qu’improbable en raison du veto américain, une résolution du Conseil de sécurité pourrait également étendre la compétence de la CPI à des crimes israéliens.

Conclusion : Le non-adhérent d’Israël au Statut de Rome n’empêche pas Netanyahou d’être poursuivi si des crimes ont été commis dans des zones sous juridiction de la CPI.

Les États membres du Statut de Rome sont tenus d’exécuter les mandats de la CPI

Si la CPI émet un mandat d’arrêt contre Netanyahou et qu’il se rend dans un pays membre du Statut de Rome (comme la France), cet État a l’obligation légale de l’arrêter et de le remettre à la Cour. Cette règle est claire dans le Statut de Rome et a été appliquée à plusieurs reprises, même si des considérations politiques ont parfois freiné son exécution.

Une déclaration erronée aux conséquences graves

L’affirmation de Jean-Noël Barrot selon laquelle Netanyahou bénéficierait d’une immunité n’est pas seulement fausse, elle est dangereuse :

  • Elle alimente la désinformation sur le fonctionnement de la CPI.
  • Elle pourrait affaiblir la légitimité de la Cour, en faisant croire que ses décisions sont arbitraires ou qu’elles dépendent des affiliations politiques des États.
  • Elle minimise les droits des victimes des crimes potentiels commis dans les territoires palestiniens.

Une immunité qui n’existe pas

Contrairement à ce qu’affirme Jean-Noël Barrot, Benjamin Netanyahou n’a aucun droit à une immunité face à la CPI. Ni sa fonction de Premier ministre, ni le fait qu’Israël ne soit pas signataire du Statut de Rome ne peuvent le protéger. La CPI est une juridiction internationale conçue précisément pour garantir que les crimes les plus graves ne restent pas impunis, quelle que soit la fonction occupée par leurs auteurs.

Conclusion : La fonction de Premier ministre de Netanyahou ne lui offre aucune protection face à la CPI.

Un rappel essentiel : le droit international prime sur les jeux diplomatiques.

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