La Quadrature du Net attaque devant le Conseil d’État l’obligation d’identification du Pass sanitaire

mise à jour le 10/06/21

La Quadrature du Net attaque le pass sanitaire

Le gouvernement vient de lancer son système de Pass sanitaire. La Quadrature du Net dépose un référé (recours d’urgence) contre ce Pass sanitaire devant le Conseil d’État, car il divulgue de façon injustifiée des données d’état-civil et de santé.

L’accès aux grands événements sera limité aux personnes présentant certaines garanties contre la pandémie telles que le fait d’être vaccinées, d’avoir réalisé un test PCR ou de s’être récemment rétablies de la maladie. Ce n’est pas cette limitation que nous avons choisi d’attaquer. Le problème principal que nous attaquons est que, pour apporter la preuve d’une telle garantie, chaque personne devra fournir un Pass sanitaire comportant son nom afin, comme l’a expliqué Cédric O, de prouver qu’elle en est bien la titulaire par la production d’une carte d’identité ou d’un passeport. Ainsi, l’accès aux grands événements sera en pratique limité aux personnes disposant d’une carte d’identité ou d’un passeport. C’est cette conséquence du Pass sanitaire que nous sommes sur le point d’attaquer devant le Conseil d’État.

Si, en pratique, la possession d’une carte d’identité semble être une obligation pour beaucoup de personnes, elle ne l’est pas en droit : notre identité se prouve par tout moyen (pendant des siècles, par exemple, elle se prouvait simplement par témoignage oral, ce que l’administration admet d’ailleurs comme étant toujours valable). La possession d’une carte d’identité ne doit pas s’imposer davantage qu’elle ne l’est aujourd’hui, car ce type de fichage généralisé risque d’avoir de terribles conséquences avec le développement des nouvelles technologies et la légalisation de la surveillance de masse.

Reconnaissance faciale

Dès aujourd’hui, nombre d’entre nous refusons de renouveler notre carte d’identité depuis qu’un décret de 2015 prévoit que la photo de notre visage doit obligatoirement être numérisée et centralisée dans le méga-fichier TES en cas de renouvellement de papiers d’identité. Ce méga-fichier, que nous avons attaqué sans succès devant le Conseil d’État, sera la base idéale du système de reconnaissance faciale généralisée dont rêvent les différents partis de droite dure qui se partagent actuellement le pouvoir.

Traçage automatisé

De plus, la crise sanitaire ne doit pas être un prétexte pour rétablir l’obligation généralisée de détenir une carte d’identité telle que l’avait imposée le gouvernement de Vichy afin de traquer et de tuer les Juifs et les résistants.

Cette crainte est d’autant plus grave que le système de code en deux dimensions (parfois appelé « cachet électronique visible » ou « 2D-Doc ») intégré au Pass sanitaire est celui destiné à intégrer les futures cartes d’identité biométriques. Ce système simple et pratique de code en 2D facilitera le traçage constant et à grande échelle de toute personne présentant sa carte d’identité.

Si, à l’heure actuelle, le Pass sanitaire permet déjà et très facilement la constitution de fichiers illicites de données personnelles, la situation pourrait très vite s’aggraver s’agissant des futures cartes d’identité. En facilitant le contrôle d’identité (il suffit de scanner un code 2D, n’importe qui peut le faire avec un smartphone), on peut s’attendre à des contrôles d’identité de plus en plus numérisés et nombreux, de la part de la police (en entrée de manifestation ou en cités) comme des services de sécurité privés (discothèques, festivals, transports, hôtels…).

Il faut redouter que la loi impose rapidement à ces systèmes de contrôle d’identité de conserver durablement les informations automatiquement collectées sur les cartes d’identité — cela a été le cas pour les téléphones (voir notre dossier). Le but : mettre à nos informations d’identité à disposition de la police et des services de renseignement pour leur permettre de suivre à la trace nombres de nos activités.

En résulte un triptyque idéal de traçage constant, automatisé et centralisé de l’ensemble de la population : géolocalisation du téléphone, reconnaissance faciale et contrôle d’identité automatisé.

Données de santé

Comme si cet avenir n’était déjà pas assez insupportable, le Pass sanitaire pose dès aujourd’hui un autre problème aussi absurde qu’injustifiable : la lecture du code en 2D permet à n’importe qui, toujours aussi facilement, d’accéder à des données de santé très sensibles mais parfaitement inutiles au fonctionnement du Pass, date de prise du vaccin, nom du vaccin, contraction passée de la maladie… Difficile de comprendre pourquoi le gouvernement a permis un tel système, parfaitement contraire tant au décret qu’à la loi encadrant le Pass sanitaire. C’est un autre argument que nous déploierons devant le Conseil d’État contre ce système.

Refuser la surveillance de masse

Nous devons repousser toute tentative de rendre obligatoires les cartes d’identité et de généraliser la reconnaissance faciale (qui sera une conséquence probable de l’obligation d’avoir une carte d’identité). Le Pass sanitaire, dans son format actuel, renforce ces deux risques mortels pour nos libertés.

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