L’Australie a franchi une étape sans précédent en adoptant une loi interdisant l’utilisation des réseaux sociaux aux jeunes de moins de 16 ans. Cette mesure, qui vise à protéger les enfants contre les dangers des plateformes en ligne, s’accompagne de sanctions sévères pour les entreprises qui ne respecteraient pas la réglementation, avec des amendes pouvant atteindre 50 millions de dollars australiens (environ 32,5 millions de dollars américains).
Une mesure stricte pour encadrer les réseaux sociaux
Adoptée par le Sénat australien jeudi dernier, cette législation impose à des plateformes telles que Facebook, Instagram et TikTok d’empêcher les moins de 16 ans de créer un compte. Le Premier ministre Anthony Albanese, fervent défenseur de la loi, a affirmé que les réseaux sociaux sont devenus des « plateformes de pression sociale, des vecteurs d’anxiété et parfois des outils pour des prédateurs en ligne ».
Anthony Albanese encourage les jeunes à délaisser leurs écrans pour des activités plus saines, comme le sport. Cette initiative législative est soutenue par une majorité écrasante de la population australienne : selon un sondage récent, 77 % des citoyens approuvent cette interdiction.
L’Australie envisage d’interdire les réseaux sociaux aux jeunes de moins de 16 ans ! Ce seront aux géants des plateformes concernées de bien s’assurer que les
utilisateurs ont l’âge requis. Mais cette loi a aussi ses
détracteurs. pic.twitter.com/mdjJWXUHgT— TV5MONDE Info (@TV5MONDEINFO) November 25, 2024
Les voix divergentes autour de la loi
Si la loi a été bien accueillie par certains, comme Ali Halkic, un défenseur de la lutte contre le harcèlement qui a perdu son fils victime de cyberintimidation, elle n’a pas fait l’unanimité. Halkic voit dans cette interdiction un premier pas vers un environnement en ligne plus sûr pour les générations futures. Cependant, des critiques soulignent que la mesure pourrait avoir des effets négatifs.
Des groupes de défense des droits humains et des universitaires mettent en garde contre les conséquences possibles pour les jeunes vulnérables, notamment les adolescents LGBTQ ou les jeunes immigrés, qui trouvent souvent sur ces plateformes des espaces de soutien. La Commission australienne des droits de l’homme a également soulevé des préoccupations concernant une possible restriction des droits fondamentaux des jeunes à participer à la société.
Les défis de la mise en œuvre
Un autre point de friction réside dans l’application concrète de cette loi. À ce jour, les modalités précises pour vérifier l’âge des utilisateurs n’ont pas encore été définies. Les régulateurs auront 12 mois pour élaborer les mécanismes de mise en œuvre. Par ailleurs, des exceptions pourraient être accordées à certaines plateformes comme WhatsApp ou YouTube, qui sont parfois essentielles pour des besoins éducatifs ou professionnels.
Les défenseurs de la vie privée s’inquiètent également d’une potentielle collecte accrue de données personnelles pour garantir le respect de la loi. Sarah Hanson-Young, sénatrice des Verts, a vivement critiqué cette initiative, qu’elle qualifie de « tentative des baby-boomers de dicter aux jeunes la manière dont ils devraient utiliser Internet ».
Un précédent pour la surveillance numérique de masse
L’une des préoccupations majeures est que les outils mis en place pour restreindre l’accès des moins de 16 ans pourraient facilement être utilisés pour surveiller un plus large éventail de la population. Par exemple, des systèmes de vérification de l’âge ou des technologies de reconnaissance faciale, mis en place pour limiter l’accès des enfants, pourraient être utilisés pour surveiller de manière intrusive les utilisateurs adultes. L’extension de cette interdiction pourrait réduire l’accès des citoyens, y compris des adultes, aux plateformes en ligne qui sont aujourd’hui des outils importants de discussion publique, d’information et de mobilisation politique. Si cette régulation est imposée à une échelle plus large, elle pourrait limiter la possibilité pour des groupes d’exprimer des idées ou de discuter de sujets sensibles, en particulier pour ceux qui n’ont pas accès à des alternatives en dehors des réseaux sociaux.
Une nouvelle ère pour les réseaux sociaux en Australie ?
Alors que l’interdiction fait débat, elle reflète une volonté croissante de mieux protéger les jeunes face aux dangers du numérique. Toutefois, les questions liées à la mise en œuvre, aux exemptions et aux impacts sociétaux restent en suspens, suscitant à la fois espoirs et inquiétudes.
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