Reportage de notre journaliste Kate dans un bureau de vote : Comment se passe un dépouillement ?

mise à jour le 19/04/22

J’ai testé pour vous le dépouillement du premier tour de l’élection présidentielle 2022. Je me suis rendue au cœur d’un bureau de vote francilien d’une ville de plus de 50 000 habitants dont le maire est à étiquette LR. À 19h45, c’est l’heure du rendez-vous pour tous les volontaires prêts à passer une bonne heure et demie à dépouiller.


Sachez que chaque citoyen français a le droit de se porter volontaire, c’est un droit dont chacun d’entre nous dispose. Tout dépend du bureau de vote. Dans certains, les habitués affluent en masse, alors mieux vaut arriver très tôt. Pour moi c’était une première !

L’arrêt officiel des votes étant fixé à 20 heures tapantes, en attendant nous patientons tranquillement dans le réfectoire de l’école maternelle transformé pour l’occasion en bureau de vote. L’ambiance n’est pas forcément des plus chaleureuses. Chacun attend sagement, certains scrutent avec curiosité les nouveaux venus dans ce groupe d’habitués. Au total, nous étions quatre nouveaux.

C’est enfin l’heure. L’un des membres du bureau va récupérer les clés de l’urne, fermée par deux cadenas, et les remet au président du bureau. Ce soir-là, nous sommes seize personnes réparties par quatre sur quatre tables. Pendant qu’on nous demande de nous installer, le président du bureau ouvre l’urne. Au même instant, l’assesseur passe à chaque table afin d’expliquer le mode d’emploi du dépouillement. (Lors d’une opération de vote, les assesseurs siègent aux côtés du président du bureau de vote. Ils s’assurent bénévolement du bon déroulement et de la régularité du vote. Cela consiste à vérifier l’identité de chaque électeur, faire signer la liste d’émargement et tamponner la carte électorale.) Les membres du bureau comptent les enveloppes contenues dans l’urne. On nous demande de nous répartir les tâches : deux personnes pour noter les résultats, une pour ouvrir les enveloppes et une autre pour lire à voix haute le nom inscrit sur le bulletin. Les membres du bureau regroupent les enveloppes par centaine et chaque centaine est redistribuée sur chaque table.

A notre tour de recompter qu’il y a bien 100 enveloppes. Une fois que le compte est bon, nous pouvons procéder au dépouillement de la première centaine. Et tout ce recomptage est effectué devant les agents municipaux. Dans ce bureau de vote, ils sont deux pour surveiller chaque table. C’est vrai que ça donne une sensation assez désagréable. On se sent épié dans nos moindres faits et gestes. Je me suis attribuée la tâche importante de noter les résultats. Les personnes autour de moi avaient l’air bien rodées.

Il faut savoir qu’à chaque bulletin blanc, nul, doublé, on se doit d’appeler l’assesseur qui ensuite vous autorise à reprendre le comptage des voix. Tout ceci aura duré un peu plus d’une heure dans une ambiance très studieuse. Attention ! on a quand même la responsabilité des résultats entre nos mains. Ceci dit, la tâche n’est pas compliquée, il suffit de savoir lire et écrire, et d’avoir une bonne vue pour cocher les bonnes cases. Je me suis laissée aller à une question indiscrète à l’une de nos observatrices : qui est-elle et quel parti représente-t-elle et ses collègues ? Réponse : tous sont mandatés par la mairie, y compris les membres du bureau. J’ai été un peu déçue, je m’attendais à rencontrer des militants de tous bords. Bah, non, pas dans cette commune.

L’heure et demie passée n’a pas été trop laborieuse pour les 955 bulletins dépouillés (sur 1 195 inscrits dans la circonscription). Pour couronner le tout, à la fin, nous avons eu le droit à une pâtisserie fine chacun, sans rien à boire. Je vous avoue que j’ai trouvé la récompense assez sommaire. Pas très convivial mais rien d’étonnant non plus compte tenu de l’ambiance… J’ai vu l’un des membres du bureau, âgé d’au moins 80 ans, en train de mettre de côté un sac en papier plein de dosettes de café et de tisane. En tentant précipitamment de cacher sa réserve, le sac a craqué sous mes yeux… Pris en flagrant délit ! On m’a tout de même proposé de revenir le 24 avril, ainsi qu’à une autre jeune femme nouvellement venue. Preuve que le cercle n’est pas fermé ! Et j’y reviendrai avec plaisir !

Pour terminer, très honnêtement, à aucun moment je n’ai douté des résultats. C’est peut être dur à avaler mais c’est vraiment la réalité du terrain. Plus le dépouillement avançait et plus l’écart se creusait. Dans ce bureau de vote, le président sortant Emmanuel Macron est arrivé en tête, suivi de Jean-Luc Mélenchon. Le quartier est situé dans une zone très résidentielle où vivent beaucoup de retraités. C’était cohérent ! Autour de moi, 85 % des personnes étaient âgées de plus de 60 ans. Sur leur visage, aucune déception, aucune grande joie non plus mais sans doute par souci de discrétion. C’est ce que j’ai ressenti. Pourtant, sur l’ensemble de la commune, c’est Jean-Luc Mélenchon qui est arrivé en tête avec 33 % des voix contre 28% pour Emmanuel Macron, avec une abstention de 26%. Comme quoi, un quartier n’est pas représentatif d’une commune et encore moins d’un pays.

Alors, le 24 avril, allez voter, allez dépouiller. Vous plongerez dans le monde du système (électoral au moins). C’est une façon de relativiser les opinions partagées sur internet. Tout n’est pas joué d’avance… Rendez-vous le 24 !

Kate pour Le Média en 4-4-2.

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